L'affaire Enric Marco avait déjà fait l'objet d'un roman très documenté de Javier Cercas, paru en en 2015, sous le titre de L'Imposteur. Un sujet sur lequel planchent depuis un certain temps les cinéastes espagnols Aitor Arregi et Jon Garaño, avec pour première idée d'en faire un documentaire, projet qui n'a finalement pas abouti. Et c'est donc sous la forme d'une fiction qu'ils l'ont repris, avec Eduard Fernández dans le rôle principal, absolument remarquable. Le film suit cette grande imposture, celle d'un homme, président de l'association des déportés espagnols, sans avoir jamais été interné dans un camp de concentration, à partir du moment où ses mensonges sont proches d'être découverts. Avec quelques courts flashbacks, qui résument parfaitement le cheminement de ce mystificateur qui ne craignait pas de se regarder dans un miroir, sans éprouver le moindre remords. Le film retranscrit parfaitement le pouvoir de conviction de l'affabulateur et son éthique pathétique mais réussit également à en faire un individu qu'on ne peut totalement vouer aux gémonies, eu égard au bien qu'il a fait, paradoxalement, pour les vrais déportés espagnols, ignorés pendant longtemps dans leur pays, même après la fin de Franco. Avec sa mise en scène sobre et efficace, Marco, l'énigme d'une vie est une bénédiction pour tous ceux que les méandres de l'âme humaine ionnent.