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“Les souvenirs, c’est du béton armé recouvert de velours.” — extrait (inventé) du Courrier du 6e Balcon.
Il y a ce moment — ridicule et sublime — où Marco, sous le poids de ses propres mensonges, ne s’effondre pas. Il s’ajuste. Comme un meuble bancal sur un sol penché. Ce film-là, Marco, l’énigme d’une vie, ne redresse rien. Il penche avec lui. Et dans ce déséquilibre, quelque chose se révèle.
Le pitch ? Oublie-le. Il est secondaire, voire suspect. Disons : un homme s’invente une vie. Une imposture historique. Un héros de carton. Un mythe pour salons feutrés. Mais ce n’est pas ça l’essentiel. Le cœur du film bat ailleurs, dans les interstices entre vérité et récit, entre documentaire maquillé et fiction nue. Aitor Arregi et Jon Garaño, les réalisateurs, ne nous racontent pas une histoire : ils nous piègent dans ses couches.
Le scénario ne se contente pas de rebondissements : il enchaîne les effacements. Ce qui est montré n’est jamais sûr. Ce qui est dit l’est trop. Chaque séquence est un masque, chaque plan une mise en doute. L’intrigue devient fractale, un labyrinthe à l’architecture brutaliste. On s’y perd avec un plaisir coupable. La mise en scène frôle le fétichisme du détail : papiers, textures, visages. La photographie de Javier Agirre Erauso travaille l’ombre, les lumières indirectes, les ambiances feutrées comme des non-dits.
Et puis il y a lui. Eduard Fernández, glaçant de justesse. Il joue un homme qui joue un rôle : mise en abyme parfaite. Sa diction est un effet sonore en soi. En face, Chani Martín incarne la rigueur de l’historien, l’exactitude inconfortable. Les scènes entre eux sont des duels immobiles. Le jeu d’acteur, ici, n’est pas démonstratif. Il est insinuant.
La bande originale ? Elle s’efface. Aránzazu Calleja cisèle une musique presque honteuse d’exister, comme si elle craignait de déranger. Et pourtant, à l’écoute attentive, chaque note frappe juste, comme un silence brisé au scalpel.
On pourrait croire à une dénonciation. Mais non. Le film ne juge pas. Il invite. À ressentir. À douter. À penser — ou croire penser. C’est un film qui se dérobe, qui laisse des traces floues. Il fait ce que le bon cinéma ose : il trouble.
Tu t’attendais à un biopic bien rangé ? Moi aussi. Grosse erreur.
Alors... chef-d’œuvre ou supercherie ? Peut-être les deux. Et si c’était ça, la leçon de cinéma ? Rien n’est laissé au hasard. Même pas le mensonge.