Fin du deuxième tome de la saga de l'Assassin Royal dans son découpage original, La Nef du crépuscule conclut brillamment les aventures de la jeunesse de Fitz au sein de la forteresse de Castelcerf. On pourrait presque s'arrêter là, les complots discrets et intrigues politiques feutrées s'achèvent en une apothéose terrible qui n'offre point de retour.
Ne cherchez pas un sens au titre énigmatique de ce tome, qui ne trouvera sa véritable essence que dans le tome 12 du cycle, profitez plutôt des atermoiements d'un Fitz qui refuse toujours plus d'être un pion sur un échiquier dont il ne distingue pas les bords et rue dans les brancards. La narration à la première personne est toujours aussi immersive, et si on peut s'agacer de suivre un héros toujours plus larmoyant sur son triste sort, force est de constater qu'il a fichtrement raison de se plaindre.
Le précédent tome faisait vaciller la fidélité de Fitz envers son suzerain, La Nef du crépuscule illustre toutes les conséquences de choix anodins en apparence, dévastateurs au final. Les magies, discrètes en préambule, révèlent leur utilité à l'intrigue, tout comme les silences d'Umbre et les manigances d'un Royal toujours plus insaisissable.
Comme toujours, Robin Hobb nous régale de portraits et d'ambiances décrites avec minutie et clarté, sans pour autant laisser l'action de côté. Une action toujours feutrée, sans effets de manches, on est loin du cliché du héros s'en allant sauver le monde armé de sa grosse épée...
Le thème du désespoir est très fort dans le cycle de l'Assassin Royal, La Nef du crépuscule est celui qui l'illustre le mieux. Son final laisse le lecteur un peu assommé, presque inquiet. Où trouver une suite dans une conclusion pareille ? Ayez confiance, Robin Hobb sait parfaitement où elle va...