Le nombre des années
Rien ne laissait présager une rencontre, encore moins un lien fort. C’est la ion pour le cinéma et plus particulièrement un film, Elle et lui de Leo McCarey, qui créera l’opportunité d’un partage...
Par
le 8 févr. 2025
Pierre, 48 ans, fait la connaissance de Florence, 72 ans, à la sortie d’un cinéma où ils viennent de voir Elle et lui de Leo McCarey, la version en couleurs de 1957 avec Cary Grant et Deborah Kerr. Les cinéphiles savent parfaitement que ce film représente le mélodrame romantique par excellence.
Si Florence aborde Pierre presque négligemment, c’est parce qu’elle le reconnaît pour avoir déjà assisté en même temps qu’elle à une projection de ce même film un peu plus tôt dans une autre salle. Leur premier échange leur permet de réaliser que tous deux sont des inconditionnels du film. A vrai dire des deux films, puisque Leo McCarey en a tourné deux versions. La première, en noir et blanc, qui date de 1939, avec Irene Dunne et Charles Boyer, à ne pas confondre avec son remake en couleurs. Pour les distinguer, il suffit de se rappeler que les titres originaux diffèrent Love Affair pour la première version et An Affair to pour son remake. Il s’avère que Pierre et Florence assistent à toutes les projections de ces films dans Paris, une véritable obsession partagée qui leur permet des commentaires de connaisseurs. Ces conversations qui se succèdent au gré des projections au Champo ou à la Filmothèque du quartier latin sont très évocatrices pour l’habitué qui fréquente justement ce quartier depuis des années, allant jusqu’à le considérer comme une sorte de paradis des cinéphiles, puisque ce sont pas moins de trois cinémas indépendants classés « Art et essai » qui se côtoient sur une centaine de mètres dans la petite rue Champollion (5è), sans compter le Cinéma du Panthéon un peu plus haut, dans la rue Victor-Cousin. Le roman va jusqu’à nous emmener dans le restaurant qui se trouve juste en bas de la rue Champollion, rue des Écoles. C’est d’ailleurs en jetant un coup d’œil au age pour une rapide vérification que j’ai réalisé que ce restaurant a récemment changé de nom.
Ce qui devait arriver…
A force de partager des séances de cinéma et de discuter de deux films qui constituent une sorte de sommet du romantisme cinéphile, la complicité intellectuelle pourrait n’être qu’un début menant à une complicité plus complète. Mais, la différence d’âge est là, ce que le titre souligne évidemment. On peut même considérer que Jean-Pierre Montal s’attaque à sa face nord personnelle en mettant en scène cette histoire. Il le fait avec pudeur et tout en retenue, visant essentiellement la concision et le choix du mot juste. Son choix de l’écrit laisse libre cours à l’imaginaire et surtout nous permet de faire quelque peu abstraction de la différence d’âge entre les protagonistes. Vu sous angle, on peut dire que l’histoire fonctionne, à coup de chapitres relativement brefs et de références cinéphiles.
Le grain de sable
C’est au moment où l’histoire pourrait évoluer vers une trame relativement classique mais perturbée par la différence d’âge, que tout bascule. Cela nous vaut une seconde partie surprenante où, en guise d’explication pour justifier ce changement de cap, nous avons droit à une métafiction franchement inattendue qui voit Pierre découvrir et lire un livre écrit par Florence. Cette partie s’avère nettement moins enthousiasmante que la précédente. On y est certes préparé par une sorte de partie intermédiaire qui voit Florence s’éloigner pour raison familiale. Les échanges se limitent alors à quelques messages presque anodins mais qui font sentir que tous deux attendent le moment où ils pourront se revoir.
Conclusion
L’éloignement donne à Pierre et Florence le temps pour réfléchir et donc prendre du recul. Jean-Pierre Montal nous fait certes rêver et nous fait sentir toute la puissance de l’imaginaire par les mots. Il nous transporte également dans le monde des cinéphiles qui se laissent emporter par ce que les images nous racontent dans les salles obscures. Par contre, lorsque les lumières se rallument, il faut se rendre à l’évidence que la vie continue avec ses multiples contraintes. D’ailleurs, s’il existe des personnes réelles qui courent de salle en salle pour voir et revoir le film qui les obsède, ce n’est probablement pas pour voir Elle et lui. De plus l’auteur laisse entendre que ses deux versions ent très régulièrement dans les salles parisiennes. Il est vrai que le remake en couleurs de 1957 e à l’occasion. Par contre, l’original de 1939 n’est que rarement montré.
Critique parue initialement sur LeMagduCiné
Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Lus en 2025
Créée
le 14 mai 2025
Critique lue 16 fois
3 j'aime
Rien ne laissait présager une rencontre, encore moins un lien fort. C’est la ion pour le cinéma et plus particulièrement un film, Elle et lui de Leo McCarey, qui créera l’opportunité d’un partage...
Par
le 8 févr. 2025
Phil Connors (Bill Murray) est présentateur météo à la télévision de Pittsburgh. Se prenant pour une vedette, il rechigne à couvrir encore une fois le jour de la marmotte à Punxsutawney, charmante...
Par
le 26 juin 2013
114 j'aime
31
L’introduction (pendant le générique) est très annonciatrice du film, avec ce petit du coucou, éclos dans le nid d’une autre espèce et qui finit par en expulser les petits des légitimes...
Par
le 6 nov. 2019
79 j'aime
6
L’avant-première en présence de Bertrand Tavernier fut un régal. Le débat a mis en évidence sa connaissance encyclopédique du cinéma (son Anthologie du cinéma américain est une référence). Une...
Par
le 5 nov. 2013
78 j'aime
20