Le mythologique, scanner du contemporain.
Les limites de l'image, ici, écartelées, violées, réinventées sous tes yeux.
Le grain, l'ivresse, regarde, savoure, essuie la poussière qui gifle ton visage.
Le glaviot qui mouille ta joue, c'est Tsui qui s'amuse, il vient de te cracher à la gueule.
Comme Chang Cheh en son temps, The Blade révolutionne le film d'action et pour ce faire, Tsui Hark n'y va pas par quatre chemins, il choisit la ligne droite. Il offre une relecture moderne, organique et cocaïnée du premier volet de la trilogie du Sabreur Manchot qu'on doit au Maître de la Shaw Brothers.
L'éternel recommencement.
Du même morceau de terre glaise à malaxer, faire renaître l'espoir : le Wu Xia Pian n'est pas mort. Regarde, il bouge encore.
Le bestial comme chemin de traverse, la violence en maelstrom du carnage, le knock-out comme aboutissement.
L'image en vie, se métamorphose sans cesse, se strie, craque, au bord du déchirement.
La réalité ultra-brutale est frénétique, capturée sur le vif par une caméra témoin qui tente de la mettre en cage, dans un univers de bruit et de fureur, de râles et de sang.
Avec The Blade, Hark signe probablement son chef-d’œuvre.
Il décadre, démembre, déstabilise sa mise en scène et en virtuose retranscrit le cataclysme.
Il fait flèche de tout bois, synthétise l'esthétique en aiguisant ses cadrages. L'anarchie constructive, en somme, l'obsession du mouvement perpétuel, le tourbillon vertige à l'appétit sanguinaire, subversif et frondeur.
Le tumulte ? Il mute sous tes yeux, il se gonfle de rage brûlante et fuse jusqu'au malaise.
Il zoome en avant et en arrière, amoncelle les cadavres et cite Peckinpah (les volailles éventrées de Pat Garrett et Billy le Kid ou le scorpion au menu des fourmis de La Horde Sauvage) quand il piège chiens ou porcs avant d'en faire de la pâtée, déchiquetés.
Comme un préambule au sort réservé aux hommes.
Sous tes yeux, la décadence danse, mon ami.
Son héros zebulon sort du cadre, il traverse le film comme un missile aux trajectoires folles, accélère, ralentit, sous un déluge de points de vue.
Tout éclate, jusqu'au duel final, où le chaos imprègne la pellicule, la parasite, lui donne vie, quoi.
Et t'emporte, comme une tempête emporte tout ce qui dée.
La bise.