Alors voilà.
Il y a un moine qui se fait sauvagement tuer.
Il y a une bande de criminels qui terrorise une petite ville.
Il y a une femme qui hésite entre deux hommes et veut les obliger à se battre.
Il y a le patron d'une manufacture de sabres qui veut prendre sa retraite.
Il y a un de ses employés qui veut connaître la vérité sur le sort de ses parents.
Il y a un tueur volant et néanmoins tatoué.
Et j'en e encore.
Le tout va à un rythme infernal, ce qui donne, dans les premières minutes du film, une rapide impression de chaos total.
L'erreur serait de croire que ce film n'est pas maîtrisé. Mais ce n'est pas le cas, bien au contraire. Cette impression de fouillis est totalement dominée dans le but de plonger les spectateurs dans le chaos.
Car l'image qui me reste de The Blade, c'est l'image de l'Enfer représenté à l'écran. L'Enfer d'un film où tout n'est que souf, feu, douleur, tristesse, chaos. Souf des pièges à loups qui referment leurs mâchoires d'acier sur les animaux et les hommes. Douleur lors des cérémonies de scarification et les séances de punitions collectives. Membres arrachés. Perversions diverses. Cris et hurlements d'un bout à l'autre du film. Humains ravalés au rang d'animaux. Brigands qui ressemblent à des démons.
La réalisation elle-même est démoniaque : importance des scènes qui se déroulent dans une nuit inquiétante, éclairages angoissants, plans rapprochés où l'écran est envahi par des yeux terrifiés ou terrifiants, sang qui éclabousse le décor, plans vertigineux où la caméra fait des galipettes, roule par terre, s'envole dans les cieux et ne nous cache aucun détail des combats.
L'emploi, dans cette critique, d'une comparaison avec l'Enfer, me paraît justifié par l'importance de l'imagerie chrétienne du film. Ainsi, un crucifix se révèle avoir une importance grandissante tout au long de l'histoire. Et il faut noter aussi la place gigantesque tenue par le feu dans ce film, feu destructeur, feu qui génère souf et mort, feu synonyme de Mal. Alors, je pense sincèrement que, même si ce film est chinois, la thématique chrétienne de l'Enfer y est largement présente, voire représentée concrètement à l'écran.
Je ne connais quasiment rien au cinéma d'arts martiaux chinois. Alors je ne peux pas dire si ce film est révolutionnaire (même si je le suppose, ne serait-ce que dans sa représentation des combats, qui me paraît assez inédite). Mais il est formidable. On n'en sort pas indemne, tant le film est douloureux et angoissant. Mais c'est un grand moment de cinéma. Certaines scènes sont sublimes, comme le combat dans les bambous (au camp des brigands), la seconde attaque de la cabane isolée où Ding On s'est réfugié (combats sous la pluie et dans la boue).
Et surtout un duel final exceptionnel.
Ah oui, j'ai oublié de mentionner le méchant, Fei Lung (désolé si ça ne s'écrit pas comme ça). Un méchant, un vrai, un dur, un tatoué (et quels tatouages !). Un qui fait vraiment peur, tant on sent qu'il est capable de tout.
Un grand film !