Westworld, la belle arnaque.

Je viens de finir le dernier épisode de la saison 2.

L'idée de base de ce défouloir géant est enthousiasmante. On imagine les questions que cette série va pouvoir poser autour du comportement des hommes et femmes quand on a pas les conséquences de ses actes à assumer ainsi que le rapport entre humains et android, le pouvoir et sa création, bref y'a du potentiel.

Les décors sont magnifiques, les paysages somptueux.

Pour moi le problème de base se trouve autour de la narration et des personnages et il me semble que cela découle de la propension des auteurs et autrices à et ab du mystère et de la surprise. Lost était un bel exemple de cet abus (oh surprise les deux ont le même producteur). Un bon mystère dans une dramaturgie, est une information que le spectateur ne connaît pas mais qu'il a envie de savoir. Qu'il crève d'envie de savoir ! Il faut donc que le spectateur comprenne pourquoi cette information a de l’importance pour la quête du personnage et donc qu’il connaisse l’objet de cette quête. Or, en l'occurrence, les auteur.rices cherchent tellement à nous perdre, surtout dans la saison 2, que souvent, les enjeux de(s) protagoniste(s) sont un peu flou...et c'est du coup, beaucoup plus difficile pour nous de s’y intéresser. J’ai souvent eu le sentiment qu’ils avaient d’abord produit la surprise (

Dolorès/Maeve sortent de leur soumission

) et qu'ensuite ils ont cherché à leur donner un but.

Ou Dolorès se met à tuer tout le monde à tour de bras, hyper surprenant par rapport au personnage de départ, et ensuite on va lui donner un but…

J’en viens à la surprise. Pour qu’elle soit efficace, il faut que le spectateur soit surpris mais qu’en même temps ça lui semble évident. Que ça lui fasse apparaître tout ce qu’il vient de voir sous un nouveau jour et que ça éclaire les zones d’ombres (Voir l’Arnaque justement). C’est difficile à faire, parce qu’il ne faut pas l’annoncer mais il faut quand même la préparer. Sinon, on a l’impression que l’auteur.rice s’amuse à nous surprendre au mépris des bases du récit qu’il a posé. Et, pour moi, ça fout tout par terre. Autant le récit et les surprises de la saison 1 sont réussies de ce point de vue autant les surprises que réservent les comportements des personnages en général sont hyper mal amenées (je crois que c'est ce qui a fait que malgré les imperfections de Lost, j'ai adoré cette série : je me suis complètement attachée aux personnages, j'avais envie de les suivre n'importe où). Les

retournements de Dolorès et Maeve

sont mal fait, je n’arrive pas identifier précisément ce qui manque, mais je n’y crois pas. Je me demande si le parti pris d’avoir gardé des personnages au visage très lisse et peu expressif même quand ils se « réveillent » n’a pas nuit pas à l’empathie que j’aurais pu ressentir pour elles (et eux).

Le moment où on apprend que Maeve peut contrôler les hôtes par la pensée, est aussi mal choisi, trop opportun, il aurait fallu qu’on ait une préparation. Là, je me suis dit : « ça tombe à pic. », j’ai vu ça comme un procédé de narration qui permettait à l’auteur.rice d’empêcher la mort de son personnage.

Alors que, dans ce cas précis, ce pouvoir a un vrai intérêt dans l’histoire et donc aurait dû être mieux amené.
Un très bon exemple est aussi

la conversion de William de la bonté absolue à une cruauté tout aussi radicale.

Très importante pour la surprise en effet, mais pas crédible. Et il n’aurait pas manqué grand chose en l’occurrence, juste de er un peu plus temps là-dessus, pour nous faire voir sa dégringolade plutôt que de multiplier les scènes entre personnages sur la vie, le choix, la place…

La construction de la saison 2 est intéressante, tous ces fils narratifs, ce mélange dans les temps de narration, c’est intéressant. Mais pourquoi ne pas baliser tout ça un tout petit peu ? Histoire qu’on puisse s’y retrouver un peu plus facilement...J’ai eu le sentiment d’un rapport de force (comme ce que décrit la saison 2 d’ailleurs, une surenchère de rapport de force, c’est à qui tuera qui...pourquoi ?..

.les motivations n’étaient pas claires ? Regardez la 52ème scène entre Teddy et Dolorès dans laquelle elle lui explique que « sa place n’est pas ici, mais dans la Valley beyond », qu’elle fait ses propres choix,blablablabla ou bien encore la 33ème entre Bernard et Ford avec un salmigondis philosophique à peu près équivalent

) entre les auteur.rices et le spectateurs, comme s’ils voulaient absolument nous montrer qu’ils étaient plus malins que nous.

Enfin, j’ai trouvé qu’il y avait plein de moments où les faits n’étaient pas logiques.
Exemples :

saison 2, la fin, les hôtes s’entretuent, contrôlés par Clémentine, Clémentine est tuée. Pourquoi Maeve n’utilise-t-elle pas son pouvoir de contrôle pour les arrêter alors qu’elle l’a fait quelques épisodes avant au milieu de la cour du Shogun ?
Maeve qui est criblée de balles et qui ne meurt pas au milieu de la saison 2, en revanche, elle meurt quasi sur le coup à la fin de la saison.
Le scénariste et les hôtes sont face à deux voitures et peut-être 6 agents de sécurité dans la jungle et le scénariste doit se suicider pour sauver tout le monde alors qu’ils n’ont eu de cesse de tuer tous les agents de sécurité dans le centre de contrôle (les agents sont équipés de mitraillettes hyper sophistiquées et les hôtes de revolvers et de fusils de western, mais rien de ne vaut un bon vieux tromblon!)

Enfin, j'ai été dérangée par les idées que véhicule cette série. Elle veut nous faire croire qu'elle parle de choix, de place etc, à cause des questions que les personnages se posent (pendant de longues, longues heures) à l'écran...mais ce qu'on y voit ? Des hommes qui cherchent à assouvir leur pulsions en martyrisant des android, des hommes qui font de l'argent sur les pulsions d'autres hommes, les pulsions des visiteurs masculins (pas de visiteuse féminine qui nous dirait à quoi rêvent les femmes) qui se résument à poursuivre, tuer tout ce qui se met en travers de leur chemin et violer des femmes. Et quand les android prennent le pouvoir, qu'est ce qu'ils font ? Ils rendent œil pour œil. L'étincelle d'humanité est très rare et souvent suivi de mort (

suicide du scénariste par ex, ou Teddy mort parce que trop gentil

). Alors, on peut souscrire à la vision très noire de l'humanité qu'ont les auteur.rices, mais j'y ai plutôt vu un procédé scénaristique visant à justifier la succession de fusillades, tortures et autres joyeusetés.

À la fin de cette critique je me demande bien pourquoi j’ai mis 4 étoiles à cette série...c’est très frustrant, parce que j’avais envie de l’aimer et j’y ai pris du plaisir à certains moments, mais j’ai aussi fini les deux premières saison très énervée...pour les raisons que j'ai essayé d'expliquer.