Game of Curule-chair

J’en attendais pas grand-chose je dois dire (doux euphémisme). J’ai lancé ça, comme ça, un peu au pifomètre, parce qu’en bon Citoyen Romain que je suis, j’ai grand besoin de pain et de jeux pour er la vacuité d’une morne existence, oscillant entre la souf et l’ennui. 

Et bin, ça a été plutôt une très bonne surprise. Alors, entendons nous bien; c’est loin d’être un «banger» et c’est truffé de défauts. Mais globalement, j’ai trouvé ça très agréable à suivre.

Il y a ce petit charme très Gameoftronesque, fait de sang, de culs et de tractations politiques douteuses, transposé à l’histoire antique, qui, toutes proportions gardées, m’a pas mal rappelé au bon souvenir de l’Auguste Série Rome. 

Alors oui, j’imagine que certains apprentis Ayatollahs de la rigueur historique s’arracherons le peu de cheveux qui leur restent sur le crâne devant une telle comparaison (encore que…), mais nonobstant le décalage temporaire entre les deux show (pour le meilleur et pour le pire), on a une certaine forme de continuité dans le délire et c’est pas pour me déplaire.

Si la CGI peut un peu piquer les yeux de prime abord, j’ai fini par m’y faire (après tout, ce n’est qu’une Série TV et qui est loin d’avoir le budget d’un RoP (140 vs 465 M$), donc bon, soyons indulgent) et j’ai pu apprécier de belles reconstitutions, qui vous plonge dans cette Cité bouillonnante avec une relative efficacité.

La narration est très bien menée. Le récit choral, suivant différents points de vue, se déroule avec fluidité et dynamisme. Avec un bon équilibre entre la Grande Histoire et les petites histoires.

Les acteur(e)s font un café de qualité, même si j’ai malheureusement toujours autant de difficultés à séparer le visage de Iwan Rheon du personnage de Snow Bolton (j’en jaunit à l’idée!)…

Un point m’a également frappé: il y a une constante ambiguïté morale, même chez les «bons personnages» qui fait énormément plaisir, car extrêmement rare dans ce genre de production à la sauce Américaine. On a quand même le gentil Numide qui ampute sans anesthésie son compagnon d’arène pour avoir plus de liberté de mouvement. On a sa brave maman qui empoisonne sciemment une honnête péripatéticienne en mode Osef-dégât collatéral… Et je ne parle même pas du personnage principal qui est clairement un anti-héros dans la plus pure tradition. Bref, on a des personnages conçus clairement pour être les «gentils» de l’histoire, qui peuvent au besoin commettre des actes assez borderline, ce qui à mon sens participe à un univers moins manichéen et surtout plus crédible: si on et que l’on est le produit de son environnement, il est difficile d’imaginer qu’un Bisounours puisse longtemps évoluer dans un écosystème semblable à l’Empire Romain sans subir peu ou prou une implacable évolution… A l’inverse, même les plus grosses ordures (et il y a de la belle ordure, oui.) ont leur petit moment drôle, touchant ou sensible…

Le délire autour des courses de char était plutôt pas mal. Il y a tout un folklore plutôt bien travaillé et retranscrit, qui rend le bouzin crédible et consistant.

On a aussi au age le plus magnifique des Deus Ex Machina que j’ai jamais vu, toute fiction confondue, en la personne de l’éruption du Vésuve. Niveau Deus Ex, ça se pose là. Et pourtant ça fait sens, vu le contexte et vu la période. Bien joué sur ce coup.

En parlant de ça, j’ai beaucoup aimé le côté crépusculaire du age qui a suivi cet évènement, même si un peu rapide. Ça a fait son petit effet Madeleine de Proust chez moi en me rappelant les sentiments que j’avais eu devant une BD que je lisais étant gosse et où il y avait aussi un moment où l’aire était saturé de cendre et de désespoir.

Bon, tout ça étant dit, n’allons pas non plus trop loin dans un délire hagiographique hein!

Comme dit tantôt, il y a pas mal de défauts.

Déjà, on retrouve les classiques interprétations historiques controversées (Titre), comme les batailles de pouces et certains choix un peu chelous dans le destin des personnages.

Le côté Gameoftronesque, j’aime bien, mais parfois, ça va un peu loin et il arrive qu’on flirt avec le pillage pur et dur (cf le générique, que je soupçonne d'avoir été obtenu de la sorte : "Bonjour Chat GPT; peux tu me pondre un générique façon House of Dragon, mais sur la Rome Antique? Merci ma poule").

Si j’ai pu m’acclimater des CGI lors des plans large sur la Cité et les monuments, j’ai beaucoup moins de largesse d’esprit en ce qui concerne la faune animalière et je concède volontiers que les lions en image de synthèse, ils font roter du sang.

D'ailleurs, en parlant du lion, pourquoi t'ouvre la cage mon grand? C'est quoi ton problème? T'as des soucis dans ta vie ou quoi? Qui fait ça franchement?... Bref.

Il faut reconnaitre également que pas mal de romances étaient pas mal téléphonées et forcées… La seule qui m’a semblé sonner juste était celle de Xanax et Cala, mais pour les autres, c'était pas toujours ça.

La mort d'Anthony Hopkins n'a rien à envier à celle de Marion Cotillard en terme de gênance...

On a souvent la sensation que dans ce monde, tout le monde, partout, entre et sort comme dans un moulin, quelque soit le lieu ou le statut (des esclaves qui quittent la demeure du maitre très facilement, des quidam qui rentrent dans des palais, des temples, des prisons etc. finger in ze nooze...)

J’ai aussi détesté (et le mot est faible!) tout le délire autour du personnage de Ursus. D’ailleurs, j’vous jure que j’ai galéré un max à retrouver le nom de ce clampin (essayez de taper «Those about to die distribution» sur Google pour voir). Il a fallu que finalement j’aille sur un obscur forum Anglo-Saxon pour retrouver son blaze au détour d’une discussion. C’est dire si ce perso sert à rien et est une grosse farce! Comme si l’équipe du film en était elle même consciente qu’ils avaient fait de la grosse merde là-dessus… Alors que pourtant il est mis en scène comme un important antagoniste quasi central, so dark, so mysterious, so badass, so dangerous… avec sa démarche de mec qui s’est mis du verre pillé dans le slip. Mais sérieux, comment ils ont fait pour pondre un perso autant foiré? Je veux dire, rien ne va avec lui. Que ce soit sa mort (présenté comme un puissant T-1000, il se fait powned par une mère au foyer et un éclopé), son statut (il est censé faire violemment chanter Xanax sur son é lointain… Comme si quelqu’un au monde en avait quelque chose à carrer des déclarations sans preuves d’un quidam 30 ans après les faits…) et surtout, SURTOUT ses motivations ; je veux dire, le mec voue une haine indicible à Xanax. Il est prêt à tout (encore une fois, 30 ans après les faits), pour plonger Xanax dans des abîmes de désespoir et de tourments, en lui arrachant méticuleusement tout ce qui lui est cher… Et tout ça pour quoi? Je vous le donne Émile; en gros, Xanax l’a «trahi» car il n’a pas utilisé la Force, façon Rey Skywalker, pour soulever les 30 tonnes de gravats enflammés qui lui étaient tombés sur le coin du museau. Non, au lieu de ça, il a préféré sauver sa peau (c’était genre un gamin de 5-7 ans à l’époque hein) en sortant tant bien que mal de la bâtisse en feu… Nan mais sérieux les gens; qui va réussir à trouver cette rancune une demi-seconde crédible?... N’importe qui au monde dans cette situation serait content de retrouver son vieux pote en vie après tant d’années et irait boire une bonne cervoise avec lui afin de rattraper le temps perdu (et accessoirement essayer de lui soutirer un peu de fric histoire de dre l’utile à l’agréable). Mais non, pas lui… Lui il est en mode «Agrou agrou, je vais te voler, te manger, te tuer et te violer (oui, dans cet ordre)». Qu’est ce que c’était naze…

Vraiment dommage cette histoire car elle était facilement dispensable à la trame globale. Et là, ça fait vraiment grosse tâche de saleté sur un vêtement qui était relativement attrayant… 

Bref, globalement, une bonne surprise que cette série. Qui a des faiblesses, certes. De sérieuses faiblesses, c’est entendu. Mais qui est trèèèèèèès loin d’être aussi minable que d’aucuns le clament et qui se laisse bien voir. Du coup, si vous ne faites pas d’allergies épidermiques aux CGI, si vous êtes amateur de GoT et/ou Rome et/ou Péplums et si vous aimez les toiles politico-historiques avec plein de fesses et d’hémoglobines, foncez.