En trois saisons, Daredevil s'était imposée et continue d'être une référence parmi les séries Marvel, ainsi qu’en tant qu’adaptation de comics. L'annonce de son retour, après divers digressions télévisuelles de la part de Marvel, et la volonté de garder le ton sombre amené par Netflix avaient de quoi enthousiasmer. On retrouve alors avec plaisir Charlie Cox, offrant toujours une interprétation excellente de Matt Murdock, tiraillé entre sa défense au barreau et sa part d’ombre - sauvage une fois le costume enfilé. Il faut s’habituer à le voir exercer sa profession diurne (plutôt intéressante) puisque c’est ce que la série souhaite mettre en avant, nous laissant à peine une vingtaine de minutes de l’Homme Sans Peur en 9 épisodes (dont la moitié sur le dernier). Si l'aspect plus urbain, proche des New-Yorkais est sympathique, ce dualisme conflictuel a des airs de déjà-vu des saisons précédentes, et la redite se ressent également dans le retour de Fisk et ses manigances politique (et un D'Onofrio toujours sur le fil de l'explosion sourde), de Bullseye, et des situations dramatiques attenant à la psyché des protagonistes.
Cette faiblesse d'écriture est marquée par la sur-dramatisation de certaines séquences, dont l'ouverture qui force sur les scènes “dures”, mais sans grande spontanéité qui prend aux tripes. Les situations clichés (et fan service) s'enchaînent alors, dans une théâtralité visant certainement à compenser la trame frêle (Fisk devient maire, Murdock refoule sa nature profonde), en plus d'épisodes de remplissage procéduriers. Le manque de réels enjeux antagonistes (autres que des embûches au quotidien) impacte également la portée de ce Born Again, illustré par un finale décevant révélant clairement le caractère de teaser de cette première saison. On ne loupe pas, non plus, les nombreux clins d’œil aux autres personnages du MCU, comme pour rassurer le spectateur que Daredevil est bien connecté à cet univers cinématographique et sériel.
Malgré le plan séquence tendu et la chorégraphie du face à face décisif, dans les 15 premières minutes, la suite du show repose davantage sur des effets numériques et un sur-découpage de l’action. La violence qui suinte du quartier de Hell’s Kitchen est allègrement affichée et les scènes où l'avocat aveugle démembre ses opposants l'ayant sous-estimé restent grisantes. Dans l'ensemble, la mise en scène est plutôt pauvre, très typée films Marvel du début des années 2000, avec beaucoup d’effets factices (fumée, éclairage, fonds verts). Les plans font cheap avec leur lumière artificielle, et regorgent de MacGuffin. On regrette la précision et force visuelles de l'époque Netflix qui avait élevé le Démon de Hell’s Kitchen au-dessus de la plupart des super-héros cinématographiques.