Saison 1 :
On se souvient que la décision de mettre fin à Bosch, la série policière conduite par Michael Connelly lui-même et adaptant ses romans policiers, prise par la production alors que le show était l’un des plus populaires aux USA, avait été mal reçue. Par son public bien entendu, ce qui ne surprendra personne, mais plus inhabituellement, par son équipe toute entière : des scénaristes (Connelly lui-même, son co-showrunner Eric Overmyer) aux interprètes (Titus Welliver, qui avait enfin trouvé le rôle de sa vie, en tête), tout le monde se désola d’une décision assez incompréhensible, mais surtout de la fin d’une équipe d’amis qui avaient pris plaisir à travailler ensemble et qui étaient fiers du résultat de ce travail… Très rapidement, cette équipe a donc réussi à trouver une nouvelle maison pour les accueillir (c’est-à-dire de nouveaux financements…), et a réussi à poursuivre, sans rupture, « l’aventure Bosch », sous le titre sibyllin de Bosch : Legacy.
On se souvient qu’à la fin de la dernière saison de Bosch, Harry quittait le LAPD et devenait détective privé, tandis que sa fille Maddie décidait au contraire d’entrer dans la police. Sans surprise, Bosch : Legacy montre les premières enquêtes menées par le nouveau « private eye », dans une association improbable avec sa vieille ennemie Honey Chandler (Mimi Rogers, impeccable), ainsi que l’intégration dans la police de Maddie (Madison Lintz, qui voit donc son personnage devenir beaucoup plus central dans la série, et semble parfois un peu trop frêle dans son interprétation… même si cela correspond à son personnage de « boot »). La liaison avec la dernière saison de Bosch se fait naturellement avec la continuation de l’histoire de Carl Rogers, que ses avocats arrivent à faire libérer, et dont aussi bien Bosch que Chandler veulent « la peau ».
Dans ce age de témoin, disparaissent malheureusement plusieurs personnages-clé de la série, que l’on regrettera beaucoup : la sympathique Grace Billets, le machiavélique Irvin Irving et surtout le partenaire de toujours, Jerry Edgar (Jamie Hector vient quand même faire un petit coucou aux copains, pour prouver sans doute qu’il n’en veut à personne de continuer sans lui). On gagne par contre un nouveau protagoniste, le sympathique Mo (Stephen A. Chang), geek capable de résoudre n’importe quel défi technique, ce qui semble toujours un moyen facile de démêler toutes les situations, sans que les scénaristes n’aient trop à se cre la tête. Autre dommage collatéral de la transition : exit la sublime maison suspendue de Bosch, sans doute trop chère désormais pour le budget plus serré de la série, et que l’on nous dit menacée par un tremblement de terre qui en endommage la structure (ben voyons !).
Globalement, si la plupart des qualités de Bosch demeurent, la série perd significativement en vraisemblance : la fortune du milliardaire Vance ant, en l’absence d’héritiers, à la société qu’il a créée, par exemple, ne semble pas correspondre à une réalité juridique US ; l’épisode du vol de gaz dans un complexe industriel tient presque de James Bond ; le recours à une nouvelle tueuse à gages implacable est une autre facilité vaguement ridicule. On se raccroche donc à l’interprétation solide de Welliver, qui s’est empâté et semble vaguement fatigué, ce qui correspond bien à l’évolution de Harry Bosch.
Même si l’on prend beaucoup de plaisir devant cette première saison, on regrettera que Bosch : Legacy adopte la solution facile pour s’assurer de la fidélité de ses téléspectateurs, celle de ne pas conclure toutes les enquêtes en cours au dernier épisode, et de se terminer par un cliffhanger indigne de Michael Connelly. On sera bien entendu devant nos écrans l’année prochaine, mais on espère ne pas avoir à regretter la décision de poursuivre cette aventure.
[Critique écrite en 2022]
https://www.benzinemag.net/2022/08/17/prime-video-bosch-legacy-poursuit-laventure-harry-bosch/
Saison 2 :
La première saison de Bosch : Legacy, la nouvelle série poursuivant l’adaptation des enquêtes de Harry Bosch, le détective star de Michael Connelly, désormais retraité du LAPD et é « du côté obscur » puisque travaillant comme enquêteur au service d’un cabinet « d’avocats de la défense », se terminait sur un cliffhanger insoutenable : l’enlèvement de Maddy, la fille de Bosch, par le serial violeur qu’elle traquait. Il nous aura fallu attendre plus d’un an pour découvrir le sort qui lui a été réservé… même si le premier épisode de la seconde saison (The Lady Vanishes, clin d’œil à Hitch) débute quelques minutes après la fin de la première : c’est la magie des séries TV !
Il faut bien reconnaître que le démarrage de cette seconde saison est un pur shot d’adrénaline, combinant tension extrême, forte intensité émotionnelle – puisque depuis les débuts de la première série, Bosch, alors qu’elle n’était quasiment qu’une enfant, nous nous sommes attachés au personnage de Maddie, et ressentons d’autant plus l’épreuve à travers elle et son père ent lors des deux premiers épisodes – et coup de théâtre bien pensé. Et puis il y a l’indéniable bonus de retrouver tous les personnages de la série originale, dont la brève apparition nous fait ressentir combien, malgré tout, on a perdu dans le age de relais à Bosch : Legacy. Mais le véritable problème est que, logiquement, lorsque la série reprend ensuite son rythme « habituel », l’impression d’une décélération – et donc d’une déception – lui est presque fatale.
Il faut dire que les deux fils narratifs conduits en parallèle (procédé habituel avec la série et avec Michael Connelly) ne sont pas réellement ionnants : en revenant sur l’épisode « jamesbondien » de la raffinerie dans la première saison, qui était son gros point faible, et en nous proposant une nouvelle enquête qui s’avère cette fois beaucoup trop confuse, Connelly et ses scénaristes ne facilitent pas notre adhésion !
Heureusement, peu à peu, la saison retrouve son punch, grâce à de beaux personnages de « méchants » (car comme disait Hitchcock, bla bla bla…), et à l’excellente idée de construite sur l’ambigüité de l’iration professionnelle que Maddie (Madison Lintz, plus assurée que lors de la première saison, alors qu’elle est désormais un personnage central) ressent pour son père (Titus Welliver, empâté, mais toujours parfaitement adéquat), alors que celui-ci – qui n’a jamais été, on le sait, un flic modèle – a des comportements de moins éthiquement acceptables.
Ce qui nous amène à une belle conclusion, à un joli coup de force de Honey Chandler (Mimi Rogers), dont on apprécie le petit cadeau d’un ultime face à face avec Irvin Irving (le grand Lance Reddick, malheureusement disparu depuis). Et puis il y a ce cliffhanger psychologique final, beaucoup moins stéréotypé finalement que celui de la première saison. Et ce qui, surtout, conforte notre addiction à cette série qui, sans coups d’éclats et sans guère de médiatique, s’est imposée au fil des années comme l’une de celles que nous avons le plus de plaisir à retrouver chaque année.
On se retrouve donc à l’automne 2024, pour suivre les prochaines étapes de « la vie de Maddie »…
[Critique écrite en 2023]
https://www.benzinemag.net/2023/11/16/prime-video-bosch-legacy-saison-2-for-the-life-of-maddie/
Saison 3 :
Cette fois-ci, après seulement trois saisons de Bosch : Legacy, cette seconde série, moins enthousiasmante, qui avait succédé à l’originale, Bosch (7 saisons, quand même !), excellente, il semble bien que Connelly raccroche les gants télévisés, et que nous devrons nous contenter – ce qui est tout sauf un problème – de ses romans. On quittera l’un des plus « beaux » (comprenez complexe, intrigant, paradoxal, etc.) héros récents d’une série policière US avec des regrets, et ce d’autant plus que ces dix derniers épisodes sont probablement les plus faibles de tous…
… Car si, comme de coutume, plusieurs enquêtes – tirées de différents livres de la « saga littéraire Bosch » s’enchaînent et s’interpénètrent au fil de ces épisodes, il est cette fois indéniable que l’accumulation de « plots » et « subplots », pas tous bien traités, crée à la fois un sentiment de saturation et de frustration : le principe était dans les neuf saisons précédentes, qu’il y ait une intrigue principale, complétée par des histoires « secondaires », plus simples, plus rapidement résolues. Ici, on e systématiquement du coq à l’âne, le tout à un rythme effréné, ce qui nous laisse souvent avec l’impression qu’on n’a pas vraiment tout compris à ce qui vient de se er. Certaines enquêtes, comme la dernière, qui voit l’apparition in extremis de Renee Ballard, soit un personnage important des livres qui fait un drôle de tour de piste alors qu’on en est à la conclusion de la série, sont bâclée en moins de quarante-cinq minutes, ce qui est réellement un comble, tant la crédibilité du processus d’investigation – sur laquelle est basée toute l’œuvre de Connelly – est mise à mal…
Bien entendu, l’un des grands charmes du travail de Michael Connelly est la richesse de ses personnages, et leur évolution – ainsi que celle de leurs rapports – au fil des années, alors que l’âge arrive et que l’expérience se double d’indéniables désillusions. Et, en dépit de ces failles narratives, cette dernière saison de Bosch : Legacy délivre à peu près ce qu’on attendait : entre la relation entre Honey Chandler (Mimi Rogers, qui semble souvent fatiguée…) et Harry Bosch (Titus Welliver, toujours vaillant, lui) qui est ée de la haine / rivalité à l’amitié / respect, et surtout la maturité très convaincante de Maddie en enquêtrice solide (Madison Lintz, devenue peu à peu l’un des grands intérêts de la série), il nous reste de quoi er d’excellents moments en compagnie de ces personnages que nous aimons.
On tiquera néanmoins sur le choix – décalé par rapport aux livres – de rendre Bosch ouvert à la violence personnelle pour régler ses comptes, comme un vulgaire redresseur de torts hollywoodien, ce qui est bien loin de sa personnalité établie, certes rétif à la discipline, mais toujours moralement inattaquable. Formellement, on regrettera le choix, désormais « à la mode », d’une image sous-exposée et donc souvent illisible, ce qui ne rend pas le visionnage très confortable.
Bref, on quitte la version télévisée des enquêtes de Harry Bosch sur un sentiment mitigé, ce qui est dommage quand on repense aux sommets qu’avait atteint la première série à mi-course.
[Critique écrite en 2025]
https://www.benzinemag.net/2025/05/04/prime-bosch-legacy-saison-3-un-adieu-en-demi-teinte/