Frédéric Beigbeder est agaçant. Très agaçant. Je pense qu'on est tous d'accord. Ce coté dandy cynique, poseur, jet-setteur, bien né, centre de son monde, un chouia misogyne, inconséquent, tout ça tout ça. Ca énerve, de le voir chouiner parce que c'est pas facile d'être né dans une famille de bourges avec un menton en galoche, d'aller au lycée Louis Legrand, d'être invité à toutes les soirées mondaines où l'on ne croise que des égocentriques angoissés comme soi. Moi aussi, il m'arrive de vouloir l’attraper par les oreilles, le trainer dans un immeuble de banlieue, le forcer à faire les courses au Lidl avec trois billets de 10, se lever pour aller pointer à 8h, rentrer à la maison en RER bondé, le priver de coke et lui imposer de la mauvaise bière...
Mais bon, dans ma mansuétude, je reste ouvert. Et j'avoue (personne ne me comprend à ce sujet), qu'il m'arrive de le trouver touchant, ce Beigbeder. Vraiment. Autant il n'avance à pas grand chose (même si ça se lit bien, que c'est marrant, et qu'il a du talent pour les aphorismes) lorsqu'il nous décrit ses rails entre les seins de jeunes femmes aux mœurs légères (''99 francs'', ''L'amour dure trois ans'', …), autant lorsqu'il parle de l'enfance, de ses rapports à l'enfance, et surtout avec sa fille (comme ici et surtout dans ''Un roman français''), il m'émeut.
Quel père divorcé n'a pas connu ces accès de culpabilité, de ne pas être là pour ses enfants ? Quand Beigbeder me parle de sa fille, ça me file la chaire de poule. Parce que je m'identifie, sans doute. Parce qu'il retranscrit à merveille ce sentiment d'un père bancal, absent, imparfait, d'un amour inconditionnel pour ses mômes. Et j'en arrive à oublier mon agacement. Ce qui n'est pas une mince prouesse.