Une plongée immersive dans un exercice de style trop austère

Oui, il est difficile de mettre une note si tiède, si médiocre à un livre qui ne l'est pas, qui respire la littérature à chaque page. Car reconnaissons le, le roman de Marguerite Yourcenar est un joli exercice de style, parfaitement maîtrisé sur un terme purement stylistique. Faut-il pour autant le ranger dans la pile des classiques, intouchables, impossible à critiquer ? Certainement pas.
Comme dit plus haut, je reconnais volontiers à Mémoires d'Hadrien de réelles qualités. Il ne suffit que de quelques pages pour se plonger dans l'univers de l'Empire Romain du 1er et 2e siècle. A tel point que par moment on oublie qu'on lit un livre de littérature et de reconstitution et non pas un simple document historique, traduction latine (ou grecque, après tout, c'est Hadrien) des réelles mémoires de l'empereur. J'ai presque eu l'impression de partager l'intimité de cet homme, comme si tout d'un coup le roman de Yourcenar m'avait transporté 2000ans en arrière, mais pas comme lorsqu'on regarde un péplum avec du pop corn sur le côté, non, comme si tout d'un coup, grâce à la puissance littéraire de Yourcenar on pouvait mieux appréhender cet homme. Et elle le fait vraiment de façon remarquable, y compris sur des sujets compliqués à comprendre pour nous, comme l'idée de la divinité d'un empereur, de l'esclavage, de la gouvernance d'un Empire etc.
Alors pourquoi une note si froide ? Probablement car rarement il m'aura été aussi difficile de rester concentré face à un livre. Non, je ne suis pas un lecteur feignant qui ne veut faire aucun effort, mais quand la lecture est une lutte de chaque instant pour rester accrocher, on en vient à éprouver une certaine gêne à lire le roman. Car oui, ce style journal intime fini par lasser, il aplatit les enjeux, lisse un peu les moments forts et les rivalités. Tout est raconté, tout est vécu de loin. Et tout d'un coup, ce roman réussi devient le genre de roman qu'on a envie de ranger en haut de sa bibliothèque, qu'on est content d'avoir lu, mais qu'on ne voudra pas relire et qui prendra progressivement la poussière.

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le 20 mai 2018

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Parkko

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