Critique de "Les Monades Urbaines"

• Édition lue : publiée en octobre 2016 aux éditions Robert Laffont, traduit de l'américain par Michel Rivelin. EAN : 9782221189078
• La note ne prend pas en compte la préface, courte mais intéressante.

Résumé

De bonnes idées mais le développement laisse à désirer, surtout si l'on est attentif à la dimension sexiste du roman.

Détails (et spoilers)

L'univers dystopique décrit par Robert Silverberg rend aisément curieux, et les sept chapitres alternent les focalisations tout en entrecroisant les enjeux, rendant la lecture assez fluide et agréable, hormis le chapitre consacré au musicien qui m'a rapidement lassé. Sans trop en dire, on peut également souligner la justesse des aller retours entre questionnements internes, descriptions des monades et dialogues entre personnages, donnant un bon rythme au récit.

Malheureusement, l'auteur ne développe pas suffisamment les sujets qu'il pose. Et c'est d'autant plus regrettable qu'ils sont pour la plupart intéressants. Que ce soit l'expansionnisme, le conditionnement mental, l'aspect concentrationnaire et dictatorial, l'arrivisme, le maintien des classes sociales, et bien sûr, le bouleversement des normes en matière d'intimité et de sexualité. Et si ce dernier fait partie des plus développés, il est aussi le plus frustrant, pour ne pas dire le plus dérangeant.

En effet, les scènes de rapports sexuels se déroulent au sein d'une société qui aurait, pour le dire maladroitement, effacer la notion de consentement. Ce qui pose d'emblée un nombre de questions considérables, mais auxquelles le livre ne répondra pas vraiment, ou de mauvaise manière. S'il est assez clair que la société décrite n'est pas valorisée et que le terme de dystopie semble pertinent pour décrire Les Monades urbaines, il n'y a pas suffisamment de ages démontrant les conséquences d'un tel système normatif. Pire, ce qui pourrait er pour une forme de subtilité devient sans aucun doute du sexisme quand le point de vue des femmes est si peu et si mal représenté.

Ainsi, tous les chapitres développent le point d'un personnage masculin, et l'unique age qui confronte un habitant d'une monade au potentiel viol qu'il commet en agissant ainsi, finit par représenter une femme qui l'exca bien facilement pour son comportement inadéquat dans le cadre d'une société non monadiale. Femme dont le portrait n'est d'ailleurs pas bien éloigné du mythe du bon sauvage dans la mesure où elle représente un groupe social agraire en périphérie des monades.

C'est d'autant plus regrettable que ce livre avait de quoi soulever des questions intéressantes sur le néolibéralisme, la naturalisation des normes sociales, notamment à travers des questionnements sur l'orientation sexuelle et la monogamie. Ce qu'il fait par moment et qui constitue ses quelques qualités. mais on ne peut que déplorer le flou ambiant, qui, sous couvert de subtilité narrative, laisse en friche des questionnements pertinents. Quand ils ne sont pas tout bonnement traités de manière problématique, comme dans le cas des normes sexuelles et des potentielles agressions qui en découlent.

4.75/10.