deux mille vingt-cinq

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(janvier) dispositif minimal, c'est presque un zine, une zine des années 60, un zine prêt à couper des zobs

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(janvier) difficile de er après l'essai génial de Jean Levi, j'ai eu la sensation de rester en surface, et quest-ce que c'est répétitif

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(janvier) le texte témoigne du parcours hors du commun de Jann-Marc Rouillan et constitue de fait un sacré legs mémoriel, qui relie l'avant, l'époque d'Action Directe, à l'après : cette autopsie du dehors, cette vie fugace dans les rues de marseille, racontée au fil de la plume, au jour le jour. Il est amusant de voir Marseille à travers les yeux de Rouillan, et on trouve de vrais beaux ages dans le livre, mais il faut er outre un style un peu pataud, qui force le mantra révolutionnaire, au risque d'en être (souvent) indigeste.

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(février) à ses meilleurs moments, Créatures de Tchernobyl se lit comme une nouvelle de Lovecraft : un narrateur nous rapporte comment, au d'une peintre fascinée par les insectes, il découvre que les êtres vivants sont modifiés au de la radioactivité. C'est que le nucléaire est une énergie qui dée tous les cadres, donnant des dimensions hors normes à tout ce qu'elle rencontre. En réalité, c'est un petit livre, modeste, qui rend honneur à une personne à la croisée de l'art et de la science, rejetée par les deux catégories, qui peint inlassablement les déformations minuscules qui affectent le vivant dans les environs des centrales nucléaires, et tentent tant qu'elle le peut d'alerter un monde bien sourd à la menace existentielle de l'atome.

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(février) troisième relecture, et c'est peut-être la plus ébouriffante de toutes ? j'ai découvert beaucoup de choses qui m'étaient ées devant les premières fois. J'adore suivre l'évolution du style de Tsvétaïeva : des débuts romantiques et adolescents, son ascension dans un style expérimental, elliptique, complètement fou. souvent difficile à suivre, mais quel vol ! Et toujours, cette foi sans borne dans l'amour, cette puissance qui soulève la poète au-dessus du siècle, au-dessus des siens qui ne la reconnaissent guère, cette fierté qui défie le temps. La traduction de Ève Malleret est hyper solide, on la sent très proche de Tsvétaïeva. D'ailleurs sa post-face est archi complète et permet de bien saisir qui était Marina Tsvétaïeva dans son siècle, avec ses contradictions d'apparence et sa vie faite de misère, d'exil et d'amour (la préface de Zeno Bianu, par contre, est complètement dispensable). C'est vraiment un livre qui me laisse hagard, qui rend toute la vie un peu plus intense, ou un peu plus morne c'est selon, quelle poète !

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(février)

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(février) Au-delà de la préface magistrale de Jean Lévi, je n'ai malheureusement fait que survoler les textes historiques - le livre est difficile à trouver, et on ne peut pas garder pour toujours auprès de soi les livres de la bibliothèque. Je l'ai du coup surtout apprécié pour sa valeur historique, sa relecture de Laozi, et les historiettes croustillantes.

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(mars)

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(mars)

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(avril)

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(avril) un roman en forme de comète, dont la forme inachevée nimbe d'un mystère encore plus entier le mont analogue

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(avril) encore, mais avec plus de consistance et de recul - toujours aussi peu convaincu par son côté aristo, beaucoup plus par sa théorie des contraires et du devenir bien sûr

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(avril) Conche réassemble les fragments d'Héraclite, dans une nouvelle traduction, pour tenter de rendre compte de la cohérence de la pensée du philosophe - alors forcément, ne parlant pas grec ancien, certains ages sont un peu plus ardus, on s'étonne parfois que Conche ne rassemble pas certains fragments (sur les dormeurs), certaines démonstrations convainquent moins (sur le feu, la cité, mas ce sont peut-être les limites de Héraclite ?) - et sa volonté globalisante laisse penser que le système héraclitéen est fini, alors qu'il nous en manque forcément des pans entiers - mais ça reste quand même de la super vulga, avec tout un jeu de remise en contexte, au risque de perdre un peu le néophyte

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(avril) nouveau livre de chevet

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(mai) petit délice de lecture mais dont la substance me semble un peu volatile ? pas sûr de retirer grand chose de cette dépression dans la baignoire, détachée de toute nécessité matérielle

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(mai) relecture d'un trait entre deux sommes - texte endeuillé par la perte d'amis proches, dont les deux ont comme trait commun d'avoir vu leur rate affecté dans leur décès - dès lors s'ensuit une exploration de ce que peut être cet organe peu commun avec ses apparitions dans le quotidien, et la consommation de deux tranches de rates achetées chez le boucher, suivi d'une recherche plus philosophique et détachée de ce que peut être la vie comprise comme gelée, et dans un dernier geste inachevé, la gelée comme paradigme politique qui s'incarnerait dans les lotissements individuels

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(mai) livre somme dont la plus vive qualité est d'apporter tout un pan de la théorie noire jusqu'ici inconnu au public français : la théorie afropessimiste, qui se caractérise notamment par son postulat d'une ontologie noire, selon laquelle les personnes de couleur noire sont indélébilement marquées par l'histoire de l'esclavage qui continue de les affecter aujourd'hui, et qui nécessite par conséquent, une lecture et une réponse politique appropriées. Pour les afropessimistes, la lutte noire n'est pas subsumable dans les luttes hégémoniques de gauche, le marxisme, et même, de façon plus étonnante, dans les études décoloniales et indigènes. Les féminismes noirs et intersectionnels sont aussi critiqués pour leur propension à aligner les masculinités noires sur les masculinités blanches, là où les premières sont lynchées, criminalisées et emprisonnées à tout bout de champ par les secondes. Les afropessimistes postulent que l'histoire des femmes noires ne peut être comprise que dans le cadre de l'histoire noire, et donc de l'histoire de l'esclavage : après tout, dans la cale du négrier, hommes et femmes étaient réduits à l'état fongible de la marchandise, réduits à l'état de pure quantité, arrachés à leur terre, acculés dans un des pires procès de déshumanisation que notre monde ait connu. Noirceur est parfois excessivement sombre, mais c'est aussi ce qui lui donne son charme si particulier, dans lequel on se plaît à haïr le monde et à souhaiter sa ruine.

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(mai) roman des limites : limite de la capacité humaine à survivre dans des conditions toujours plus difficiles, limite du planisphère à étendre, et dans son dernier mouvement, limite du champ de la connaissance et de la logique. Au cœur de l'ouvrage se trouvent quelques chapitres prodigieux durant lesquels les aventuriers se retrouvent à dériver sur une épave au milieu de l'océan, sans grand espoir de s'en sortir, la nourriture venant à manquer et les intempéries ne cessant d'abattre, d'une façon quasi-hallucinatoire. Le dernier mouvement du livre est plus ouvertement exotique, avec une exploration fantastique de l'océan Antarctique, fascinante par sa propension à inventer des phénomènes surnaturels avec le plus grand des sérieux, propres à une époque où le planisphère n'était pas encore parfaitement enserré dans les mailles du capitalisme colonial et de la géographie scientifique. À ce propos, j'ai trouvé fascinant la manière dont cette écriture ée venait créer un trou dans mes représentations de l'espace antarctique, le truchement du livre m'amenant à superposer sur mon image contemporaine du pôle sud, l'image fantasmatique de Poe, de manière quasi hétérotopique (qui rappelle dans une certaine mesure l'Aventure sans pareil d'un certain Hans Pfaal, une de mes nouvelles favorites de Poe). C'est amusant de voir qu'un siècle plus tard, pour parler d'un livre lu un peu plus tôt, René Daumal devra s'échiner à inventer des phénomènes naturels délirants pour rendre envisageable l'existence du Mont Analogue, lequel se fond en réalité avec le mouvement même de l'esprit, lequel m'a également rendu crédible l'existence de l'île Tsalal et de ce Pôle sud aux eaux chaudes que décrit Poe. À ce propos, le racisme de Poe est assez instructif à nos lectures contemporaines de la représentation que pouvait se faire la modernité blanche occidentale des peuples indigènes qu'elle a détruit. Mais tout de même, c'est étonnant et déstabilisant de voir à quel point Poe fait coïncider méchanceté et malignité avec noirceur, que ce soit avec le personnage du coq noir au début du livre, ou le peuple autochtone de la fin du livre, parangon de vice qui tient en horreur tout ce qui est blanc. C'est un livre qui éclaircit l'influence de Poe sur Lovecraft.