Il y a quelque chose d’étrangement doux et mélancolique dans Final Fantasy Tactics Advance. C’est un jeu qui a bercé pas mal de sessions sur GBA, et que j’ai fini par retrouver avec un mélange de tendresse et de lucidité. Parce que si je lui reconnais une vraie singularité, un charme presque indémodable, je vois aussi mieux aujourd’hui ses limites. Et pourtant, malgré tout, il me reste très agréable en mémoire.
Déjà... Le toon du jeu détonne dans la saga Final Fantasy.
Pas de menace planétaire, pas de dieux en colère, pas de guerre ancestrale, juste un petit garçon qui fuit sa réalité trop dure et se réfugie dans un monde imaginaire. Et dans cet Ivalice rêvé, chaque personnage devient une version alternative de son quotidien, ses amis, sa famille, sa solitude. C’est enfantin, presque naïf, mais en creusant, on touche à quelque chose d’assez touchant. Attention... J'insiste sur le "presque"
Le refus du réel, l’envie de réécrire sa propre vie, de fuir le deuil, la différence, la douleur... C’est un scénario simple dans sa forme qui fini par se casser la gueule au fil de l'aventure...
La légende raconte que son scénario foireux, fait qu'il peut être mal aimé... Oui, l'histoire est prétexte, mais elle n'impacte en rien votre amusement sur le titre. Je n'ai pas fait et ne compte pas forcément découvrir le premier Tactics sur PS1, ceci dit les comparer sur le scénario me semble assez peu pertinent, surtout au vu de tous ce que ce jeu GBA a à offrir.
L’histoire ne brille pas toujours par son rythme.
On sent qu’elle a été pensée comme une toile de fond, un prétexte pour lancer les missions une à une. Le cœur du jeu, c’est clairement le gameplay tactique, et là-dessus, Tactics Advance propose un système solide, modulable, assez accessible pour un premier avec le genre, mais pas sans profondeur. Le plaisir vient de la gestion des jobs, du recrutement, de cette montée en puissance où chaque unité devient une pièce maîtresse de ton échiquier personnel.
Les classes sont nombreuses et bien différenciées, avec des évolutions et des spécialisations qui demandent de planifier à long terme. L’idée de lier les compétences aux armes et armures est brillante, chaque mission devient l’occasion de grinder intelligemment, pas juste pour l’XP mais pour débloquer une compétence cruciale. Ça donne un goût tactique même à la gestion d’équipement, ce qui est rare.
Mais il faut aussi parler de ce qui divise... Le système de lois. À chaque mission, une règle est imposée (pas d’objets, pas de magie, pas de combo…) au début, on trouve ça original. Ça force à s’adapter, à composer autrement.
Mais plus le jeu avance, plus ça devient frustrant.
Certaines lois sont punitives, incohérentes, voire absurdes. Et les juges, ces figures omniprésentes, censées incarner la loi, finissent par casser le rythme au lieu de le nourrir. Tu prépares ta stratégie, ton équipe, et une loi aléatoire vient te brider sans prévenir. Il y a de bonnes idées derrière, mais mal équilibrées, mal digérées.
Et malgré ce système bancal, Tactics Advance reste addictif. Parce qu’il y a un vrai soin dans le détail, dans les animations, les maps, les sprites colorés. L’ambiance est chaleureuse, presque enfantine, on est loin de l’austérité d’un Tactics Ogre ou parodique d’un Disgaea. Il y a quelque chose de plus doux ici. Moins tranchant, mais plus accueillant. Et ça fait du bien.
La structure du jeu repose sur une succession de missions, qu’on pioche à la guilde et qu’on parcourt en construisant petit à petit une carte d’Ivalice. C’est agréable, mais on sent que la répétitivité finit par s’installer. Les missions finissent par se ressembler, les objectifs sont souvent basiques ("vaincre tous les ennemis", "atteindre un point", "protéger un allié fragile"), et la trame principale reste trop discrète au milieu de tout ça.
Il y a bien quelques surprises, quelques missions scénarisées plus ambitieuses, mais on aurait aimé que l’histoire s’affirme un peu plus dans la structure du jeu. Qu’elle irrigue davantage l’expérience, au lieu d’être cantonnée à de rares cinématiques ou dialogues entre deux combats. Intéressant aussi de faire ce construire la map en même temps que notre avancé, ça rajoute de manière éphémère, l'idée que l'on soit au commande totale de l'épopée... C'est bête, mais efficace sur le moment...
Car, malgré cette légère monotonie, je suis resté.
Parce que le système de progression est satisfaisant. Parce qu’il y a toujours un nouveau job à débloquer, une nouvelle stratégie à tester. Parce que même si le rythme est bancal, la proposition est cohérente. Et surtout, parce que l’idée de ce monde-refuge, ce rêve d’enfant trop longtemps habité, trouve une vraie résonance au moment de le quitter.
Son cœur tactique solide et pour ses idées pas toujours bien équilibrées mais sincères on n’oublie pas si facilement. Un jeu imparfait, oui. Mais attachant.
Parfois, c’est ce qu’on retient le plus.