En préambule : Zaï zaï zaÏ zaï est une de mes BD préférées, une véritable révélation humoristique. Je suis depuis le travail de Fabcaro même si ses récentes productions ont tendance à s'essouffler...mais on s'éloigne du sujet.
Je me demandais comment on pouvait adapter à l'écran des blagues dont l'hilarité repose sur l'immobilité des personnages et le décalage entre les répliques absurdes et la banalité des situations. Eh ben techniquement, c'est plutôt bien géré, le réal reste sur du langage cinématographique de base (champs/contrechamps, longs plans flixes...) mais avec un timing comique vraiment maîtrisé qui fait vivre cet humour sans le trahir.
Si certaines scènes tirent un peu en longueur et sont incapables, par essence, de répliquer la drôlerie du livre (le supermarché, les retrouvailles avec la camarade de collège...), le film excelle dans la mise en scène des "petites scénettes" (le journaliste qui interroge les voisins, la discussion autour des bouteilles de 33cl...).
Autre chose : le film se débrouille pas mal quand il est livré à lui-même. Oui, parce que pour faire 1h30 de long-métrage sur la base d'une BD qui se lit en 10 minutes, il faut de la ressource. Du coup, des blagues sont forcément ajoutées par le réal et la plupart ne trahissent pas l'esprit de la BD, au contraire. Pour ne pas complètement perdre le spectateur qui n'aurait pas lu le livre, le film entreprend une sorte de "contextualisation de l'absurde". Si dans la BD, on ne sait rien de cette société si proche de la nôtre et pourtant si étrange, le réal s'amuse, au moins dans les premières minutes, à nous plonger dans une sorte de dystopie de l'absurde (tout le monde a la même voiture orange qui contrôle a destination, le poireau semble considéré comme une arme létale...). Ça décale l'histoire originale dans une sorte de SF débile et c'est assez appréciable.
Du côté des mauvaises idées apportées par le film : les personnages créés pour l'occasion et interprétés par Ramzy Bedia et Yolande Moreau. Si le premier fait sourire lors de ses premières apparitions, l'arc narratif autour de lui est bien trop lourd et répétitif. Sa présence dans le dernier acte contribue largement à le rendre pénible. La seconde, pourtant excellente actrice, joue une commissaire à la retraite (supposément alcoolique) qui prend la tête de la traque de notre pauvre personnage. Elle ne fait que cabotiner, minimisant l'humour qui provenait de la confrontation avec des flics "lambda" dans la BD.
Sinon, le casting est impeccable, JP Rouve et Julie Gayet en tête. Tout le monde est à fond et ça fait plaisir (les nombreux caméos sont très bien dosés et exploités).
Le dernier segment (pas dans la BD) plombe un peu l'ensemble mais on ne peut que respecter la réussite globale de l'entreprise.
Le tout reste un peu bancal. Le film pèche par le manque de direction artistique et de vision globale nécessaires pour adapter parfaitement cette pépite. On est parfois irrité face à ce qui ressemble à une compilation de sketchs.
Mais ne boudons pas notre plaisir, il est rare (en tout cas pour moi) de rire autant que j'ai ri devant ce film.
Question : Aurais-je trouvé le film aussi drôle si je ne connaissais pas à l'avance les excellentes blagues de l'oeuvre d'origine ? Est-ce que le film est assez malin pour réussir à atteindre le spectateur non-initié ? Pas sur...