C'est dans des décors réels et par des effets artisanaux que se joue Le retour d'Ulysse. Loin des blockbusters américains antiques et épiques, c'est plutôt dans un héritage néoréaliste que le film se positionne (on filme dehors, dans des ruines). Son réalisateur, Uberto Pasolini, neveu de Visconti, se situerait à mi-chemin entre les deux tendances esthétiques de son oncle : décrivant le retour d'un roi déchu dans son royaume dix ans après la fin d'une guerre qu'il l'a forcé à abandonner sa femme, son fils et son peuple, le cinéaste reprend à son compte les thèmes de la déchéance, de la famille et de l'héritage, chers à Visconti.
Mais il ne faudrait pas pousser la comparaison plus loin, car Uberto Pasolini adopte son style propre et signe un film en anglais qui porte un discours contemporain. Refaisant vivre à l'écran le duo du Patient anglais, autre histoire de guerre et d'amour, près de 30 ans plus tard, mais avec beaucoup plus de modestie et de sobriété, il contourne aussi le statut de star de son casting, Ralph Fiennes - Juliette Binoche, en évitant les poncifes hollywoodiens. Plus fidèle aux textes homériques, le film est aussi plus théâtral, ce qui participe à son charme anachronique. À rebours du projet épique et spectaculaire que prépare Christopher Nolan avec son Odyssée, ici, ce n'est que la fin du voyage qui intéresse le réalisateur, c'est-à-dire l'inverse de l'héroïsme. Ulysse frôle la catégorie du anti-héros.
The return, le retour d'Ulysse, n'est pas un film à l'ancienne ou cheap. C'est dans sa conception matérielle et concrète qu'il trouve sa modernité autant que sa richesse.