Il semble qu’à sa sortie, il y a de ça un peu plus de deux mois, beaucoup ont craché sur The Electric State, non seulement pour des questions prétendument qualitatives, mais aussi parce que cette production Netflix n’aura coûté que la bagatelle de 320 millions de dollars.
Parmi la flopée de crachats de presse, j’ai vu er des titres comme "Les frères Russo détruisent le cinéma", ou des trucs plus subtils comme "Ceci est un gros caca".
Donc pas très pressé de voir cet État électrique j’ai fini par me décider à y jeter un oeil, un soir de profonde mélancolie suite au visionnage d’une comédie pas drôle avec Kad Merad. Vu le déchainement de haine "journalistique" précité, je m’attendais à un nouveau naveton de la trempe d’un Suicide Squad, d’un mauvais Marvel ou pire encore, d’un Venom.
Quelle ne fut pas ma surprise en découvrant un film au visuel soigné, à la mise en scène plutôt appliquée et aux effets spéciaux de qualité. Seul le scénario pêchait par son manque d’audace et son alignement de poncifs mais le truc valait-il autant de diatribes de la part des gens pas contents ? Certainement pas.
Je veux dire, certains journaleux de presse française s’enthousiasment encore quand sort un film comme Astérix et Obélix : L’Empire du milieu, alors que la chose est de toute évidence une banale assemblée de cosplayeurs à 80 millions d’euros. Alors pourquoi cracher sur un film où une jeune fille tente de sauver son petit frère dans un monde uchronique où les robots ne sont pas de menaçants Terminators mais de sympathiques mascottes 90’s non disneyiennes et un rien surmenées ?
Donc oui, The Electric State est une honte, dans la seule mesure où son budget aurait dû justifier un film bien meilleur qu’il ne l’est (comme 70% des films hollywoodiens depuis 15 ans).
Mais est-il à jeter pour autant ?
Non.
Il s’agit simplement d’un film à destination des enfants. Rien de plus, rien de moins.
Et les geeks de quarante piges qui râleront dessus devraient se demander pourquoi ils chient sur un film pour gosses alors qu’ils tolèrent certains actioners complètement what the fuck.
Les frères Russo n’ont jamais caché leur goût pour le pur entertainment. Selon leurs propres dires, le "cinéma" au sens noble du terme n’est pas leur apanage, ils font de la "motion picture". Et cela implique non pas de bâcler leur mise en scène, ce qu’ils ne font que très rarement (Thanos se désagrégeant dans le vent, la classe...), mais d’utiliser tous les outils technologiques aujourd’hui à leur disposition. Cela e donc par tout ce que Cameron, Lucas, Zemeckis, Spielberg et Fabien Onteniente (qui est l’intrus ?) ont développé depuis 30 piges. C’est à dire que la réalisation se résume ici surtout à un travail de prévisualisation et de collaboration avec les équipes d’infographistes. En gros, le réalisateur n’a plus qu’à indiquer aux infographistes ce qu’il veut voir à l’image dans 70% de son film, en plus d’assurer le filmage des séquences physiques (très souvent sur fond vert), ou de les déléguer. Ce qu’ils font par exemple systématiquement chez Marvel.
L’ironie dans tout ça est que tout ce fric et cette technologie e dans un film qui se veut justement critique envers l’abus de technologie et surtout l’abrutissement d’une humanité proche de celle d’Idiocracy, devenue incapable de se er de son casque de réalité virtuelle et de bouger son cul hors de son siège (ce qui finira un jour par arriver, merci Zuckerberg). Le parallèle avec internet et les réseaux sociaux est bien sûr aussi flagrant que la dernière chirurgie de Madonna. On ne parlera donc pas de subtilité mais le message est toujours assez important pour être martelé.
Côté casting "humains", Enola Holmes joue les Millie Bobby Brown (ou vice-versa, je sais plus), Chris Pratt encaisse son chèque en nous faisant son éternel numéro de mec cool qui parle à un pote en CGI, Jason Alexander cristallise la déchéance actuelle de certains drogués des réseaux quand Stanley Tucci joue le parfait Elon Musk, les symptômes borderline en moins. Gustav... Giancarlo Esposito, lui, rempile pour un rôle de bad guy finalement pas si méchant, et dont la particularité est d’être le principal poursuivant des héros alors même que son personnage ne bouge jamais de son fauteuil.
Côté robots, on a tout plein de noms connus pour prêter leurs voix à Monsieur Peanutt, à une coiffeuse obsessionnelle à quatre bras et à un joueur de baseball de toute évidence fan de Negan.
Sympathique, amusant, et drivé par des héros (presque) attachants, le film se plante un chouïa sur son dernier acte, un peu ennuyeux car prévisible de bout en bout, mais ravira tout de même les enfants qui ont assez d’imagination et d’indulgence pour pardonner les quelques défauts d’une superproduction tout de même plus regardable que n’importe quel Transformers illisible de Michael Bay (bon ok, ça aussi, ce sont des films pour gosses... et pour vieux geeks).
Et sinon les 340 millions de dollars de Fast and Furious X on en parle ?