Changement d'époque, changement de technologie et changement de style pour cette adaptation de la série culte, Brian De Palma ne s'est pas contenté d'un décalque de l'original, il a livré un film en prise avec la réalité de l'après-guerre froide, aux grandes qualités, bourré de suspense et de rebondissements en dépit d'un aspect parfois confus. Mais il y a quelque chose forcément d'anti-conventionnel dans ce film qui enthousiasme autant les uns qu'il déconcerte les autres, car au-delà de l'enveloppe hollywoodienne et de la série TV dont il ne reste que le concept et la musique, se cache un auteur.
En effet, De Palma redéfinit cette identité télévisuelle et se réapproprie ce concept en recyclant ses thèmes favoris : la duplicité, la tromperie, les faux-semblants, les manipulations, les masques, les apparences, le goût pour les personnages isolés ou solitaires ... et pourtant à la sortie du film en 1996, je me souviens avoir entendu des gens dire qu'on n'y reconnaissait pas tellement la patte du réalisateur de Carrie parce qu'il se mettait au service de la star Tom Cruise et du studio Paramount, certes c'est un pur film de commande, mais qu'il sait rendre attractif grâce à du métier, grâce à sa mise en scène stylisée où la violence est traitée comme un opéra, et aussi en y glissant quelques séquences mémorables, notamment 2 qui restent dans les mémoires tant elles sont parodiées ou copiées : celle de la chambre forte de la CIA, au suspense qui fait suer à grosses gouttes, et surtout celle du final étourdissant sur le TGV, une scène totalement invraisemblable et irréalisable dans la réalité, mais qu'il faut justement prendre au dixième degré.
Certains fans de la série (dont je fais partie) n'ont pas trop apprécié que le personnage de Jim Phelps soit vu comme un traître, c'est vrai que ça m'a un peu gêné, c'est une des raisons qui m'ont empêché de hausser ma note, les autres étant que je n'y ai pas trop reconnu justement la série dont j'étais fan, car le film se perd par moments dans les méandres d'une intrigue parfois difficile à suivre. Mais en dépit de ces réserves, on peut louer De Palma qui a respecté le principal tout en faisant preuve d'irrévérence, et mis en valeur Tom Cruise sans que celui-ci ne vole la vedette à l'histoire, on peut donc prendre du plaisir avec ce blockbuster divertissant où on est content de voir quelques frenchies et d'y entendre le célébrissime thème musical de Lalo Schifrin qui rappelle le bon vieux temps, mais remusclé par Danny Elfman.