Pauvre Mickey
Loin des sous-sols étouffants de Parasite et de sa soif de dignité, Mickey 17 nous plonge dans l'immensité glaciale de la science-fiction. Avec, pour interprète, Robert Pattinson dans le rôle de...
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le 13 mars 2025
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Pitié. Stop. Je n'en peux plus.
Ce que je demande n'est pourtant pas si extraordinaire que ça. Il fut même un temps où ce que j'ai toujours posé comme exigence de base était plutôt monnaie courante. Moi, ce que j'attends juste d'un film, quel que soit son genre, c'est qu'il me respecte un peu, notamment en évitant de me prendre pour le dernier des demeurés.
Pourtant ça partait plutôt pas trop mal. Il y avait des choses de posées sur la table ; des gages comme quoi l'auteur – Bong Joon-ho tout de même – entendait nous la jouer serious business. Déjà il y avait ce postulat de départ qui, bien qu'il nous rappelle un peu trop le Moon de Duncan Jones, avait au moins pour mérite de s'ancrer dans une vraie logique science-fictionnelle, à savoir un questionnement social lié à une hypothèse technologique plutôt qu'un simple prétexte à un déluge d'effets spéciaux. Et puis, à côté de ça, c'était loin d'être désagréable de constater que, de ci de là, on pouvait saisir quelques touches créatives démontrant la volonté de créer un vaste univers disposant de sa propre personnalité : je pense notamment à ces décors parfois très soignés ou bien encore à toutes ces notes perverses du début qui font un peu penser à un Starship Troopers version light. Tout n'était pas parfait, c'est vrai. Comme tout film de son temps, ce Mickey 17 sacrifiait aussi sa part aux démons du blockbuster vingt-et-unièmiste, avec son lot de bavardages inutiles et ses effets numériques peu convaincants, mais il y avait au moins ça. C'était franchement pas génial, mais j'étais prêt à prendre ce minimum tant que ce Mickey 17 s'y tenait jusqu'à son terme. Mais sauf que non – bien évidemment – il a fallu que ce minimum syndical-là ne soit pas respecté. Il a même fallu qu'on aille jusqu'à lui chier dessus, en fait.
Ça commence d'abord avec une exposition excessivement longue (il faut attendre plus d'une demi-heure pour voir l'écran titre, tout de même), puis ça se délite lentement mais sûrement, au fur et à mesure du temps. L'esprit régressif se transforme progressivement en esprit dégressif. D'un côté, le film n'entend jamais explorer son concept au-delà de ce qu'il en a déjà montré au bout de cinq minutes, ne sachant boucler que sur une seule et même pauvre question – « ça fait quoi de mourir ? » – et de l'autre, il martèle ad nauseam sa caricature de vilains, en en rajoutant sans cesse davantage au cas où on n'aurait pas compris.
Et plus ça va, pire c'est. Parce qu'à la grossièreté consternante de la caricature offerte par un Mark Ruffalo et une Toni Collette en roue libre, s'ajoutent des personnages vraiment cons comme leurs pieds qui viennent surligner les messages de Bong, au cas où on serait trop con pour ne pas les avoir grillés.
« Ah mais attendez... Vous me considérez comme un utérus sur pattes ? » (Phrase réellement prononcée dans le film.)
« Eh mais, deux minutes, en fait les aliens ils sont gentils et nous on est les méchants ! » (Phrase pratiquement prononcée telle quelle dans le film.)
« Eh mais, en fait, notre chef c'est un facho ! J'étais pas sûr quand il avait parlé de race pure blanche et quand il faisait des saluts presque nazi à un doigt, mais maintenant que je constate qu'il veut tuer un bébé larve tout mimi sans le moindre remord, ça me paraît évident ! Tout comme il m'apparaît évident que, si je montre ça aux gens, ils se révolteront forcément ! » (Phrase qui n'est pas prononcée ainsi dans le film, mais dans l'idée, c'est ce qui est dit.)
Non mais oh... Toute la population d'un vaisseau a normalisé le fait qu'un mec serve de cobaye pour des irradiations, des expositions à des agents pathogènes, etc. mais par contre elle va se soulever comme un seul homme sitôt apprendra-t-elle qu'on fait de la maltraitance animale sur un limaçon-mignon ?!
Pfff... Mais abattez-moi (et surtout, ne me réimprimez pas).
Ce film, c'est vraiment une insulte de plus en plus décomplexée.
À un moment donné, on découvre que les Mickey n'ont pas nécessairement la même personnalité d'une réimpression à une autre. Ah bon ? Mais pourquoi ? Comment ça s'explique ? Ce n'est pas logique. Va-t-on nous donner quelques pistes à ce sujet-là ? Bah non. Osef, manifestement.
Idem, on nous montre bien au début du film comment le crush de Mickey semble nourrir une pure logique d'exploitation jetable de notre pauvre expandable (ce que je trouvais d'ailleurs être une idée intéressante). Qu'en fait le film ? Rien. Ils sont juste amoureux. C'est tout. C'est comme ça. Et de toute façon, Machine, elle a toujours été gentille avec Mickey, alors tu penses bien...
Et puis, pareil, le film e son temps à créer un espace pour que le personnage de Katz puisse être développé. Mais qu'en fait-il au bout du compte ? Bah rien, encore une fois. Que dalle. C'était juste là pour occuper le temps et justifier quelques péripéties, pas davantage.
Ce film e son temps à laisser de côté ce qui aurait pu être intéressant de développer au profit d'une approche purement moraliste et démonstrative d'un propos basique et bête comme ses pieds. Un moment particulièrement éloquent de cette logique se trouve au tout début du film, quand le scénario explique les raisons pour lesquelles les cas de multiples ont été interdits sur Terre. On évoque rapidement le cas du docteur Alan Trucmuchovski, et on le balaie en deux minutes en disant que ça a soulevé un paquet de questions éthiques sur lesquelles les gens se sont pris la tête - genre qui est coupable quand un des deux multiples accomplit un meurtre, etc. – et que c'est pour ça qu'on a décidé d'interdire la pratique de multiplication. OK. Soit, c'était peut-être de la prise de tête, mais ça avait au moins le mérite d'être intéressant. Alors pourquoi ne pas avoir creusé cette question de culpabilité / responsabilité entre doubles au lieu de se réduire à de simples histoires de jalousie, parties de jambes en l'air et autres troubles de personnalités mal expliqués ?
Putain, mais c'est juste terrible de connerie tout ça. Et c'est donc Bong Joon-ho qui ose nous sortir ça ? Alors je sais bien que déjà, avec Okja, il nous avait déjà pondu un truc pas très malin basé sur de la sensiblerie bon-marché, mais là, avec ce Mickey 17, on a vraiment poussé les curseurs au max.
Comme quoi, il semble s'en être é des choses entre 2017 et 2025...
Donc on en est là.
On en est à une époque où même un auteur comme Bong Joon-ho nous fait de la morale tire-larmes et de la dénonciation grotesque comme Disney le ferait à un gamin de 13 ans...
Eh bah putain, mais avec une réalité comme celle-là, pas besoin d'enfer. On y est déjà...
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le 5 mars 2025
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