Alors que le cinéma français joue depuis quelques années la carte des régions pour diversifier les cadres et le portrait d’une bigarrée, Lawrence Valin prend un habile contre-pied pour un thriller situé dans la capitale, qui va pourtant s’avérer particulièrement exotique. Situé dans le quartier de la Chapelle, dans la communauté tamoule en exil du Sri Lanka, le film offre un regard neuf sur une communauté généralement discrète. Un certain nombre de comédiens non professionnels nourrissent quelques séquences clairement documentaires sur un monde parallèle et inaccessible, aussi euphorique dans ses moments de liesse que terrible dans la traite humaine et la criminalité.
Mais Valin ne cherche pas à s’inscrire dans le registre du film social où la prise de connaissance avec les invisibles permettrait une empathie nouvelle, à l’instar de Rascals de Jimmy Laporal-Trésor.
Les maladresses du premier film sont principalement liées à l’écriture : le film, resserré sur 90 minutes, souffre de coupes franches, certains procédés d’exacerbation (tout le montage parallèle sur l’agression des jeunes mariés) survendent des éléments qui font long feu. Mais l’enthousiasme l’emporte clairement, dans un récit qui sait exploiter l’euphorie, la fougue et la jeunesse aveuglée de ses personnages, tout en travaillant avec une certaine finesse le déchirement du protagoniste face aux siens, considérés comme des terroristes par l’état français, mais également en rébellion face aux exactions fomentées par le gouvernement du Sri Lanka. Si la complexité ne peut pas encore suffisamment se déployer au sein d’un genre et d’un format qui imposent une efficacité de ton, on attend de la voir pleinement s’exprimer dans les films futurs de Lawrence Valin.