Revisionnage du standard absolu du western façon « Nouvel Hollywood », avec donc un regard critique sur l'Amérique et sa mythologie. A ce niveau, et dans le style spécifique de la « fausse biographie picaresque », on est à cent coudés au-dessus du surrestimé Forrest Gump. Parce que justement, là où le film de Zemeckis est sans en avoir l'air un truc limite propagandiste (Parce que oui, aux USA, même un neuneu peut devenir toutes les incarnations du héros américain, du champion de foot au self-made man, en ant par le soldat, et même quand il est outsider et marginal, il est un héros célébré par la TV, blablabla), le film de Penn, lui, offre un regard distancié et ironique sur tout ça. C'est un portrait de l'Amérique et de son Histoire dans son ensemble, mais avec un pas-de-côté, avec un esprit critique et décalé, et une forme d'honnêteté qui y fait trop souvent défaut. Les personnages historiques que Jack Crabb croisent sont ainsi des caricatures, des pantins ridicules (loin des figures statufiés de Forrest Gump), et Crabb lui-même, si il incarne aussi des figures archétypales du western (le bonimenteur, le pistolero, le colon, la tunique bleue, le trappeur) le fait toujours avec une dimension parodique. Même la figure du sage indien, à la fin, est gentillement désacralisée. (alors que l'honnêteté avec laquelle sont représentés ces amérindiens est, elle, plutôt prégnante)
Au final, on a le sentiment que Little Big Man se pose dans la continuité des westerns italiens de la même époque, non pas juste parce qu'il verse lui aussi dans la comédie, mais parce qu'il prend l'Ouest, ses figures, son imaginaire, pour ce qu'ils sont : Une mythologie, une toile de fond qu'on peut tordre, triturer, voire moquer. Cette compréhension de ce que ce « roman national » a de fictionnel, est romancé, est donc fiction.
Ce décalage, c'est ce qui manque peut-être à Forrest Gump (et à la très grande majorité de guignols qui nous parle de « roman national » en y croyant vraiment...)