Le Teckel par pierrick_D_

Un teckel e de maître en maître au fil de sa vie,modifiant par sa présence le cours de leur existence.Ce film est le dernier en date du réalisateur et scénariste Todd Solondz,ce qui fait quand même neuf ans sans nouvelles.Le gars est connu pour donner dans un cinéma d'auteur très critique de la société américaine et oscillant entre tragédie et humour noir.De ce point de vue,"Le teckel" est bien dans la ligne de son oeuvre,proposant un portrait en coupe d'une Amérique morose,voire dépressive.Ce qu'on remarque rapidement est que le postulat de départ est vite laissé de côté.En effet,la chienne change de propriétaire entre la première et la deuxième partie,mais ensuite ça devient moins clair.On ne sait absolument pas comment elle atterrit chez le prof de cinéma,c'est d'ailleurs si elliptique qu'on n'est pas sûr qu'il s'agisse du même toutou,il est identique mais rien n'indique que ce soit celui présenté au départ,et c'est pareil pour la dernière partie,quand il se retrouve brusquement au côté d'une vieille femme mourante.D'autre part,hormis dans le premier sketch et au début du deuxième,l'animal n'influe en rien sur les évènements marquant la vie des protagonistes.Solondz s'en sert comme d'un fil rouge,mais globalement ça ne changerait rien s'il n'y avait pas de chien,le sujet du film étant visiblement de décrire la vie erratique de quelques personnages à la dérive.Le teckel est surtout là en tant que marqueur social fixe,sa fidélité inconditionnelle servant de contrepoint au comportement d'humains peu fiables toujours prêts à trahir et abandonner.Mieux vaut cohabiter avec un chien qu'avec un humain,on risque moins d'être déçu,c'est bien connu et le film le confirme.La première partie se situe dans cette petite bourgeoisie que le cinéaste aime tant brocarder.Un couple de quinquas avec un fils de dix ans conçu tardivement qui est en rémission d'un cancer.Le père offre un teckel au gamin mais ça tourne mal car le gosse est un abruti qu'on évite de contrarier vu son état et qui incite le clébard à multiplier les conneries.Saccage de la belle maison si clean,et gavage de sucreries provoquant de méchantes diarrhées canines.Le papa en a vite ras la casquette et emmène la chienne chez le vétérinaire à des fins d'euthanasie.Voilà pour le premier acte.Moralité:les bourgeois sont des sales cons mais le malheur est partout.Après ça s'articule logiquement,pour la première et dernière fois du film,car l'assistante du véto,une paumée empathique,veut sauver l'animal et se barre avec,abandonnant son boulot par la même occasion.Elle rencontre par hasard un ancien camarade de lycée,pour qui elle éprouvait apparemment des sentiments,et accepte de partir dans l'Ohio avec le mec,bien que ce soit de toute évidence un camé nageant dans le brouillard.Ils atterrissent chez le frangin du junkie,qui lui est trisomique et vit avec une autre mongolienne.C'est la séquence "les handicapés sont super,apprenons à vivre ensemble".Il s'agit d'une famille bien lestée,le père est mort de son alcoolisme,la mère on n'en sait rien,le fils aîné est stone en permanence et son cadet est triso.Elle est pas belle la vie?Mais la véto est hyper positive et trouve tout ça très cool,d'autant qu'elle en pince de plus en plus pour l'aspirateur à stups bien que le gars n'en décroche pas une.Finalement ils s'en vont tous les deux,laissant le teckel aux mongols,qui adorent les animaux.Moralité:rien que du malheur mais avec de l'espoir au bout si on veut voir les choses du bon côté.Et là,ellipse de la mort.Plus de trisos,plus d'Ohio,on retrouve Médor à New York,en compagnie d'un vieux prof de cinéma complètement lessivé physiquement et mentalement.C'est l'occasion pour Solondz d'exercer son humour caustique avec cette description des écoles de ciné qui ne servent à rien.Cette partie se termine de manière supra elliptique,avec l'enseignant qui pète les plombs et le chien qu'on laisse dans une situation périlleuse sans savoir ce qu'il advient de lui.Conclusion:le milieu du spectacle,c'est rien que du malheur,surtout quand on n'arrive pas à vendre sa marchandise.Nouvelle ellipse brutale,et on retrouve à nouveau l'insubmersible cabot accolé à une mamie cancéreuse au bout du rouleau qui reçoit la visite de sa petite-fille.La vieille est vache au possible et rembarre la jeunette systématiquement.Au début on compatit au sort de la petite,mais peu à peu on découvre ses motivations et on la plaint beaucoup moins.Puis finalement on la trouve plus pathétique qu'autre chose,c'est une pauvre actrice ratée assujettie à un artiste conceptuel aigri,fauché et dragueur qui la domine totalement.Moralité:la vieillesse,le showbiz et l'art c'est rien que du malheur.Les scènes sont souvent trop étirées,le chef-op Ed Lachman effectue un joli travail sur les couleurs et le ton du film fonctionne par moments,rendant poignantes certaines séquences,alors que d'autres sont plutôt drôles.Quelques comédiens plus ou moins connus sont de la fête.Notre Julie Delpy nationale n'est guère convaincante en bourgeoise coincée,Greta Gerwig l'est beaucoup plus en cruche ravie de la crèche.Kieran Culkin,le jeune frère de Macaulay,impressionne en toxico largué et pas bavard,tandis que Danny DeVito est très bien en scénariste raté dépressif.Une Ellen Burstyn subclaquante et une Zosia Mamet,la fille de David,très juste en idiote désespérée,nous livrent un beau duo-duel.

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le 4 févr. 2025

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pierrick_D_

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