C'était le temps où un quadragénaire et lieutenant-colonel grisonnant pouvait jeter son dévolu sur une gamine de 16 ans, en l'occurrence Corysande, dite Chiffon. André Luguet fait un peu vieux beau; Odette Joyeux a dix ans de trop. C'est déjà mal engagé.
Chiffon est une adolescente exubérante et impertinente et son mariage possible avec l'officier d'Aubières est l'enjeu du roman de Gyp et du film de Claude Autant-Lara, lequel réalise une comédie Belle Epoque avec de beaux décors, de beaux intérieurs, mais creuse, pour ne pas dire stérile.
Le film est rempli de personnages pittoresques, voire excentriques, qu'un metteur en scène avisé, un Philippe de Broca par exemple, aurait su animer d'une fantaisie farfelue. Autant-Lara ne sait pas faire ça; il propose un bel écrin mais il est incapable de donner vie à ce petit monde de la bourgeoisie de province. C'est tellement sage et lisse que la comédie est vite ennuyeuse, qu'on en vient même à se demander quand elle démarre...
Au demeurant, à travers Chiffon, personnage pas du tout convaincant dans la candeur supposée de l'adolescence et les amours de cet âge, on devine la littérature et les préoccupations féminines communes. Il manque à Chiffon la sensibilité et la grâce des jeunes filles (et on en revient à l'âge d'Odette Joyeux...).