Nouvel écrit trouvé dans les archives de ma grand-mère. Cette fois-ci, le poème est signé.
Si jamais vous en savez plus sur cet auteur, ça m'intéresse beaucoup.
PROPOS DE LA MÉMOIRE
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Nous qui venions de naitre
Avons-nous la mémoire assez
Solide pour connaître
L’image de notre é ?
Avons-nous maintenant chassé
Ce souvenir de la souf
Quand nous fûmes débarrassés
De ce pain noir dont notre enfance
Fut nourrie, et puis s’est lassée ?
Avons-nous déjà effacé
Buchenwald et les pestilences
De tous les hommes tréés
Puis pourris en terre étrangère,
Beau fumier de la belle guerre ?
Et si le pas de l’oie ne lance
plus cette pesante cadence
Pour tuer amour ou raison
Oublierons-nous les saisons
Des brutes bottes allemandes ?
Quel être cher, je te demande,
Quel être cher de ta maison
Y mourût ? Et si nous lui faisons
Une couronne d’oraisons
Et puis d’oubli, bientôt de honte
Si nous permettions que montent
Sur sa tombe et sur son corps
Ses assassins en bottes neuves.
Songes-tu quelles jeunes veuves
Dans leurs rêves d’aimer s’émeuvent
Aux gestes qui vivent encore,
Ces caresses du mari mort
Puis pourri en terre étrangère
Beau fumier de la belle guerre ?
Rappelle-toi ces mains tendues
Aux bruits des bombes, aux pluies d’obus !
Rappelle-toi ces deux pendus
Et ces injures entendues
En pleine Avenue, à Nice !
Rappelle-toi l’enfant perdu
Et la mère quêtant son fils
Et ces décombres des Ardennes
Et ces patrouilles, ces milices
Ces pas de plomb de peur de peine
dans le silence et dans la haine !
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Comme d’une artère coupée
Où jamais le sang ne tarit
Je souffre toujours de la guerre.
Accords de Bonn et de Paris
Le sang ne vous coûte guère.
Sommes-nous donc des animaux
Dont la mémoire se pourrit ?
Toi qui du crime est convaincu
Tu ne peux dire ces six mots
Accords de Bonn et de Paris
Sans penser aux mots qui condamnent
Les enfants d’Oradour-sur-Glane
A mourir sans avoir vécu.
Jean Camion