La Montagne Sacrée (1973)

Alejandro Jodorowsky signe avec La Montagne Sacrée une œuvre cinématographique unique en son genre, véritable expérience sensorielle et spirituelle. Le film dée le cadre traditionnel du cinéma pour devenir un rite initiatique filmé, un miroir psychédélique tendu à notre époque et à ses illusions.


La force du film réside dans son audace totale. Il ne craint ni la provocation, ni l’hermétisme, ni l’excès. Jodorowsky convoque l’ésotérisme, l’alchimie, la critique sociale et religieuse, et les assemble dans une fresque visuelle où chaque plan pourrait être un tableau surréaliste. La photographie, absolument sublime, donne au moindre symbole une charge quasi sacrée. On est sans cesse balloté entre fascination et inconfort, ce qui constitue précisément la réussite de ce voyage spirituel.


Le personnage du Voleur, alter ego christique du spectateur, nous embarque dans cette quête de transcendance où des personnages grotesques et caricaturaux représentent les travers du monde moderne : pouvoir, sexe, argent, guerre, science dévoyée. La satire est féroce, mais jamais gratuite. Chaque scène possède plusieurs niveaux de lecture, et Jodorowsky s’adresse autant à l’intellect qu’à l’inconscient.


L’audace du cinéaste culmine dans la célèbre scène finale, où la fiction est volontairement brisée, invitant le spectateur à prendre conscience de sa propre réalité et à cesser de se perdre dans les illusions du cinéma, et de la vie elle-même. C’est une rupture brillante, osée et profondément humaniste.


En résumé, La Montagne Sacrée est une œuvre magistrale pour qui accepte de lâcher prise et de se confronter à un cinéma visionnaire. Elle reste aujourd’hui l’une des rares propositions artistiques capables de dialoguer à la fois avec la philosophie orientale, l’occultisme occidental et la critique sociale contemporaine, tout en offrant une expérience esthétique absolument fascinante.


Un film qui ne se regarde pas : il se vit.

8
Écrit par

Créée

le 5 mai 2025

Critique lue 4 fois

JohnViktor

Écrit par

Critique lue 4 fois

D'autres avis sur La Montagne sacrée

La Communauté de l'allumé.

Comme le disait régulièrement, et avec raison, un ami à moi, il y a plus d'accords dans l'intro de « Tornado of souls » de Megadeth que dans toute la discographie de U2. Et on peut reprendre cet...

le 3 déc. 2013

94 j'aime

43

L’évaingile selon Jodo.

Puisqu’on lui en donne les moyens par une notoriété nouvelle et un financement hype (John et Yoko sont de la partie), Jodo se lâche : il reprend les ambitions là où il les avait laissées dans El...

le 10 janv. 2017

58 j'aime

7

Sacré Graal !

En haut de la montagne se trouve le Jodorowsky sacré, l'immortalité artistique, les chemins qui y mènent sont dérangeants, sinueux, dégueulasses et malsains. Les routes partent dans tout les sens,...

Par

le 28 sept. 2014

54 j'aime

8

Du même critique

Future Nostalgia (2020) – Dua Lipa

Avec Future Nostalgia, Dua Lipa signe un coup de maître dans la pop contemporaine en réussissant le pari de conjuguer sonorités rétro et énergie futuriste. Dès le titre, l’intention est claire :...

le 5 mai 2025

1 j'aime

Clair Obscur: Expedition 33

Sorti en avril 2025, Clair Obscur: Expedition 33 s’est rapidement imposé comme l’un des RPG les plus marquants de l’année. Développé par le studio français Sandfall Interactive, le jeu a conquis...

le 5 mai 2025

Astérix & Obélix : Le Combat des Chefs (mini-série Netflix)

Alain Chabat revient dans l’univers d’Astérix et c’est un vrai bonheur de retrouver son sens du rythme et de l’humour ! Plus de 20 ans après le mythique Mission Cléopâtre, il adopte cette fois le...

le 5 mai 2025