C’est avec une certaine appréhension que l’on va voir un film de la Hammer. En effet, la firme légendaire s’est remise au charbon récemment, et le premier rejeton de cette firme ressuscitée fut Laisse-moi entrer, bon remake de Morse, chef d’œuvre suédois. L’espérance est donc permise au moment d’aller visionner cette nouvelle production, qui se veut lorgner du côté d’Alfred Hitchcock.
Mais fort malheureusement, les attentes ne sont pas comblées, au contraire. La Locataire est un très mauvais film, et accumule tellement de mauvais points qu’il est difficile d’en choisir un pour commencer. Le film narre l’histoire de Juliet, jeune médecin qui s’installe dans un nouvel appartement, dans lequel elle se sent observée… Dès le début, le réalisateur tente d’installer une tension latente dans le long-métrage, en insérant des scènes de suspense au milieu des scènes narratives. Sauf que c’est une mauvaise idée. D’abord parce que le suspense doit se trouver dans le scénario, et non pas s’insérer entre deux scènes pour faire peur. Là, le réalisateur tente de développer des personnages crédibles (volonté louable) autour d’une histoire romantico-dramatique, tout en insérant des scènes effrayantes la nuit pour maintenir la tension…
En résultent des ruptures de ton malvenues et répétées. On pourrait er l’éponge si le suspense était efficace. Mais patatras ! Disons le tout net, impossible d’être effrayé par ce film, pour plusieurs raisons. La première raison est encore structurelle et narrative : l’identité de la menace est révélée très tôt dans le film, éventant toute possibilité de mystère, ou d’ambiance légèrement fantastique (c’est un film de la Hammer après tout). L’inconnu est toujours plus effrayant, alors pourquoi se tirer une balle dans le pied aussi rapidement ?
Mettons cela sur le compte d’une certaine ambition, puisque du film d’horreur, il e au thriller en dépeignant le portrait d’un déséquilibré mental, qui épie sa proie. Mais l’un des pires portraits jamais vu, de par le script et le jeu d’acteur. Le script accumule tout ce qu’il ne faut pas faire, en décrédibilisant le méchant. En effet, afin de montrer à quel point il est fou, et pour le rendre menaçant, on le voit… se brosser les dents avec un air ahuri, se taper les cuisses avec une lampe torche, et se masturber dans la baignoire de sa proie (c’est vraiment dans le film). Quant au comédien, il alterne entre le ridicule, l’embarrassant, et l’amusant.
Autre énorme point noir, qui n’est pas structurel, mais qui vient s’ajouter au reste : la réalisation est complètement inappropriée. Rarement on a vu des plans aussi mal cadrés, or lorsqu’un film prétend faire peur en utilisant la suggestion, il faut savoir gérer le cadrage et la lumière. Les films d’horreur doivent tendre le spectateur en cadrant de telle manière que la menace peut provenir de tous les recoins de l’écran, que l’on s’attende au pire. Là rien, la réalisation est l’une des plus bancales vue pour un film à consonance horrifique. Comme si on regardait un film normal, mais avec une grosse musique d’ambiance qui se veut effrayante. Sans l’être.
Forcément, le bad guy ayant été décrédibilisé, la tâche était plus ardue, mais du coup, le metteur en scène en est réduit à insérer un jump scare tous les quart d’heures pour réveiller les spectateurs. Finalement, la dernière partie du film vire au film de psycho killer, ou le tueur joue au chat et à la souris avec sa proie. Nous erons sur les ultimes défauts de cette partie, pour noter le bon travail du chef décorateur Dennis Washington sur les décors de la maison.
Mais c’est vraiment tout. John Ottman livre une partition aussi pauvre qu’oubliable, Christopher Lee rend hommage à la Hammer en campant un rôle aussi inutile que caricatural. Hillary Swank ne convainc pas, et Jeffrey Dean Morgan est bel et bien risible. En conclusion, ça se veut du Hitchcock, mais c’est comme un Hollywood Night.