Junior Bonner

Clairement, c'est un film que j'aime bien. Un Peckimpah mineur ou majeur, à vrai dire, je m'en fous un peu.

Effectivement, c'est un western où il n'y a pas un seul coup de feu (sauf erreur de ma part) ; au "mieux", il y a des bagarres homériques juste avec les poings dans des saloons mais il y a aussi tellement d'autres choses …

D'abord, le titre ! Dans la VO, c'est "Junior Bonner" … Mais les distributeurs français ont encore sévi sur ce coup-là. J'imagine trop bien le cheminement tortueux de leur pensée :

Peckimpah = "la horde sauvage" ou "chiens de paille" = film violent.

Le public français a aimé ces films.

Donc il faut démontrer que "Junior Bonner" est violent.

Et vas-y que je te rajoute un insipide "le dernier bagarreur" qui n'a pas dû tromper grand monde.

Alors que Peckimpah a fait autre chose. De beau.

D'abord cette famille qui résume le film. Le père, la mère et les deux fils, Curly et Junior.

Le père (Robert Preston) et Junior (Steve McQueen) ont conservé l'esprit de l'Ouest des pionniers et des aventuriers et ne veulent pas en démordre. Les rodéos et la recherche des bons filons d'or et d'argent. Ils se comprennent sans avoir à l'exprimer. Ils s'apprécient et se respectent. Ils sont restés enfants avec du rêve plein les yeux. De la nostalgie devant un monde qui évolue faisant disparaître les ranches pour de plus juteux programmes immobiliers. Restent les rodéos avec une vie excitante de nomade pour redre les différents meetings. Les rodéos où ils sont des vedettes captivant le public qui en redemande et faisant chavirer les regards des jolies filles … En quelque sorte, ce sont des artistes qui se produisent dans des spectacles, disons-le, virils face à des vaches ou à des taureaux. La poussée d'adrénaline, quoi. Le risque. Parfois, un peu d'argent tombe quand ça marche bien.

La mère (Ida Lupino), elle, a les pieds sur terre. Elle l'aime bien son mari mais, vraiment, elle en a marre de ses histoires à dormir debout, bonnes à emballer la greluche de age en panne de rêve. Puissante et belle Ida Lupino …

Et puis le frère, cabochard. Lui, les rodéos et tout le toutim, c'est pas son truc. Par contre, bâtir une famille, faire du fric (honnêtement et régulièrement), c'est son trip.

Il y a certainement chez Peckimpah une certaine nostalgie pour un é où l'aventure prédominait par rapport à un monde plus ordonné, plus stable où le profit est le maître mot qui est le monde d'aujourd'hui.

Mais je ne pense pas qu'il faille réduire le film à seulement ça. À mon sens, il nous dévoile aussi qu'il reste toujours une porte entrouverte vers l'aventure à travers ces spectacles et ces grandes parades où le public se presse en nombre pour y assister, rêver et frissonner. Même si les spectacles reposent sur une publicité envahissante.


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le 11 oct. 2023

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JeanG55

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