Une bonne gifle en plein visage, oui c'est bien ça... j'ai encore la marque d'ailleurs.
Si dans pas mal de critiques on souligne un côté prétentieux ou bourgeois de "J'ai tué ma mère", moi je vois surtout l'oeuvre d'un gamin qui a 17 ans, alors que peu de gens croyaient en lui a voulu y croire pour les autres. Ces portraits de femmes qu'il nous livre, qu'il nous dévoile sont simplement bouleversants. Entouré de ses mentors, à l'image d'Anne Durval, dont je salue d'ailleurs l'éblouissante performance (Que ce soit dans "Mommy" ou dans "J'ai tué ma mère") Dolan s'exerce, apprend et sort comme grandit à chaque fois. Au rythme d'un film par an on aurait pu penser qu'il se serait déjà brûlé les ailes, mais non, pour ma part je trouve qu'il apprivoise à chaque fois un peu mieux son talent, ou son génie si on peut dire.
Dans "J'ai tué ma mère" on se confronte au portrait d'une mère, mais d'abord d'une femme. Une madame "tout le monde" qu'on croise tous les jours, trop occupée à éplucher ses carottes et a regarder la télé pour se prêter au jeu d'une mère compréhensive et à l'écoute. Aveuglée par sa routine, elle laisse sa relation mère-fils se détériorer, trop effrayée peut être, de faire face aux vrais problèmes qu'ils rencontrent, ou trop découragée. A trop vouloir éviter le conflit et les problèmes, elle se mure dans sa vie, dans sa routine, on à l'impression parfois qu'elle va parler, se délivrer, mais c'est comme si elle se retrouvait enfermée dans ses propres non dits, imible devant le mal-être d'un fils qu'elle ne désirait pas. Avec les années qui ont é c'est comme si elle avait baissé les bras, abandonné devant l'ampleur d'une tache, celle de renouer avec son fils. Pendant le film, elle connait pourtant des éclairs de lucidité quant à la relation qu'elle entretient avec son fils et son rôle de mère. Se rendant compte à quel point leur relation s'est détériorée, elle se demande comment ils en sont arrivés là. Cela ne remet cependant pas en question l'amour qu'elle porte à son fils, dans ses silences, on lit son attachement, son amour, particulièrement lorsqu'Hubert lui demande ce qu'elle ferait s'il mourrait aujourd'hui et qu'elle répond dans un murmure "Alors je mourrais demain".
Quant à notre cher Hubert, il est "entier", excessif, à fleur de peau et surtout à bout. Censuré par sa mère, il se confie à sa caméra, celle qui l'écoute, le calme et qui ne le juge pas. Cette haine qu'il éprouve pour sa mère est aussi forte que l'amour qu'il lui porte. Parfois on est perdu, on ne sait plus trop si on est face à un trop plein d'amour ou à de la haine pure.
L'ime dans laquelle se trouvent ces deux là semble insurmontable et pourtant on est poussé à croire que l'amour inconditionnel qui les anime prendrait le dessus sur la haine. A trop vouloir éviter le conflit, ils s'enlisent chacun de leur côté dans les non dits, dans de vides conversations qui repoussent un peu plus l'échéance d'une énième confrontation, chaque fois plus violente. Alors que le jeune Hubert explose à plusieurs reprises nous livrant alors des scènes remarquables et pleines d'émotions, la mère elle se réserve jusqu'à la fin et nous offre une des scènes les plus touchante et marquante du film, presque mythique.
Bien que le jeu d'acteur du jeune Dolan ne soit pas parfait j'ai été piquée en plein coeur par ce film qui met un rôle de femme sur le devant de la scène, un rôle féminin qui n'est pas comme souvent une sorte de faire-varloir à un autre rôle masculin. Dans ce film on est dans la ion et l'émotion, avec des scènes très touchantes ponctuées par quelque petites trouvailles artistiques. Je pense particulièrement à la scène d'Anne Durval courant en mariée dans les bois. Bien que je ne sois pas sûre d'avoir saisi à 100% la métaphore, l'esthétique de cette scène est très appréciable.
Même si ce film n'est pas parfait, je reste persuadée que c'est purement et simplement le balbutiement d'un "génie" qui nous livrera à coup sur des chefs d'oeuvres.