Le cinéma tunisien, du point de vue artistique, se porte très bien et se fait sans cesse remarquer dans les festivals internationaux (Streams, Sous les figues, Ashkal ...). Son état est bien meilleur que celui d'un pays que tous ces films décrivent comme (toujours) corrompu et donnant aussi peu d'espoir à une jeune génération qui aspire le plus souvent à émigrer. Harka confirme que le printemps arabe n'a rien changé pour un citoyen lambda comme Ali, le héros du film, qui ne peut décemment rester dans la légalité s'il veut pourvoir à ses besoins de base ainsi qu'à ceux de ses deux sœurs cadettes dont il a la charge. La tonalité est constamment sombre dans Harka, même si une voix off tente de convoquer une veine plus poétique et si le récit emprunte brièvement la route du thriller. Mais c'est bien d'une œuvre sociale (et politique) dont il s'agit d'abord, avec un engrenage fatal que l'on peut trouver cependant difficile à croire, lorsqu'il débouche sur de dernières scènes terribles, qui ont avant tout une valeur de symbole. Tourné sur les lieux mêmes où la révolution de jasmin a commencé, avec l'immolation de Mohammed Bouazizi, Harka témoigne à la fois de la colère et de l'impuissance d'un peuple qui s'est fait confisquer sa révolution. Sur un pur plan cinématographique, Il a aussi le mérite de révéler un acteur très impressionnant, en la personne de Adam Bessa.