Débâcle
6.5
Débâcle

Film de Veerle Baetens (2023)

Enfance violée.

Encore une nouvelle comédienne (mais ça vaut aussi pour les comédiens...) qui se lance dans la réalisation. Et cette fois c’est la flamande Veerle Baetens, révélée dans l’émouvant et devenu culte pour beaucoup « Alabama Monroe » qui se lance. L’actrice, que l’on a vu aussi dans les très bons mais méconnus « Duelles » (qui a pourtant eu droit à son remake américain avec Jessica Chastain et Anne Hathaway quand même) et « Quand vient la nuit » l’an é, débute donc derrière la caméra en adaptant le roman de sa compatriote flamande Lize Spit « Het Smelt ». Et on peut dire que pour un coup d’essai, c’est un joli coup; à défaut peut-être d’être un coup de maître.


« Débâcle » nous présente deux temporalités qui se répondent, celle de l’enfance et celle l’âge adulte. La première réussite du film est de parvenir à rendre le montage alterné choisi à la fois fluide et empli de sens. On e d’une époque à l’autre de manière logique et spontanée et la dramaturgie y gagne en puissance émotionnelle. La partie située dans l’enfance est solaire, empreinte d’une jolie nostalgie propre aux jeux de l’enfance et magnifiquement filmée dans la campagne flamande estivale du début des années 2000. Jusqu’au drame en tout cas. La partie contemporaine est plus citadine et grise, collant à la psychologie blessée du personnage principal. Loin d’être un gimmick ou un processus trop évident, ce contraste sied parfaitement au long-métrage.


Ce dont on parle ici est fondamentalement très grave. Très en phase avec notre époque où la loi du silence concernant ce genre d’affaire (on n’en dira pas plus pour ne pas déflorer la surprise) était reine. Baetens, qui a choisi de ne rien jouer pour se consacrer à la mise en scène alors qu’elle aurait pu se donner un rôle, filme cette histoire avec la pudeur et la retenue nécessaire. Jamais avec voyeurisme, notamment dans la fameuse scène choc. Ce qui n’empêche pas le spectateur d’être touché, presque choqué. On montre ici comment des jeux d’enfants peuvent mal tourner et que la masculinité toxique n’a pas d’âge. Et, bien sûr, les marques indélébiles que cela peut laisser sur une personne. On voit ici à quel point ce que l’on vit enfant ou adolescent nous marque au fer rouge a jamais et construit l’adulte en devenir. C’est peut-être parfois un peu trop appuyé dans la partie adulte mais au final nécessaire à la bonne compréhension des conséquences.


Les acteurs sont tous remarquables, notamment dans la partie ée. Les jeunes comédiens sont épatants de naturel notamment la petite Rosa Marchant, véritable révélation. Charlotte De Bruyne dans un rôle plus taiseux, où elle fait davantage er les émotions par le regard, ne démérite pas. Petit à petit, Baetens nous intrigue sur la teneur de ce qui va se er, créant une tension sourde. Et quand vient le temps des révélations dans la partie adulte on est un chouia déçu que ce ne soit pas plus vengeur et vindicatif, comme si elle sacrifiait la satisfaction du spectateur sur l’autel du réalisme. Il n’empêche, « Débâcle » est un beau drame, à la fois nécessaire et déchirant en plus d’être un premier film maîtrisé.


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7
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le 9 avr. 2025

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Rémy Fiers

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