Dangerous Liaisons
6.3
Dangerous Liaisons

Film de Hur Jin-Ho (2012)

Sous le vernis, un charme qui hésite

Avec Dangerous Liaisons (2012), Hur Jin-Ho propose une adaptation ambitieuse et visuellement séduisante du roman de Laclos, transposée dans le Shanghai opulent des années 1930. L’idée avait de quoi intriguer, et le résultat, bien qu’esthétiquement irréprochable, m’a laissé une impression mitigée — entre iration pour le soin apporté à l’image et frustration face à une émotion trop souvent contenue.


Visuellement, c’est un sans-faute. Chaque plan est composé avec un sens aigu du détail : les décors art déco, les jeux de lumière tamisée, les tenues élégantes… tout respire le raffinement. On sent que le réalisateur a voulu créer un cadre où la sensualité et le pouvoir se jouent en silence, dans les regards, les silences, les gestes mesurés.


Mais voilà, malgré toute cette beauté visuelle, j’ai eu du mal à me sentir pleinement impliqué. Le film semble parfois trop attaché à sa propre élégance, au point de brider la tension dramatique. On regarde, on ire… mais on reste un peu à distance. J’aurais aimé être davantage bousculé, ému, troublé — ce qui, pour moi, est au cœur même de l’œuvre originale.


L’idée de déplacer les intrigues de pouvoir et de séduction dans un Shanghai entre décadence et modernité est brillante. C’est un contexte riche, qui aurait pu donner une densité nouvelle aux personnages. Pourtant, cette richesse historique reste en filigrane, comme un simple décor de fond.


Le trio principal fonctionne plutôt bien, sans pour autant réellement enflammer l’écran. Zhang Ziyi s’en sort avec justesse, touchante de retenue dans un rôle moins évident qu’il n’y paraît. Mais l'alchimie globale m’a semblé trop mesurée. Là où j’attendais des joutes vénéneuses, je n’ai trouvé que des échanges polis. C’est beau, c’est maîtrisé… mais ça manque de venin.


Hur Jin-Ho semble avoir voulu adoucir les angles du récit original, en privilégiant une approche presque romantique plutôt que cruelle. Pourquoi pas — c’est un parti pris respectable. Mais dans cette volonté d’élégance, le film perd ce qui fait, à mon sens, toute la puissance du texte de Laclos : l’ambiguïté, le danger, cette fascination troublante pour le mal.


Ce qui m’a le plus manqué, c’est ce frisson, cette tension constante entre désir et destruction. Le film effleure ses thèmes, sans jamais vraiment les embrasser.


Avec sa mise en scène soignée et son casting solide, Dangerous Liaisons version 2012 reste une proposition honnête, qui a ses qualités — mais elle m’a donné l’impression de rester en surface. Il y a une vraie volonté d’élégance et de retenue, peut-être trop. J’en ressors avec une impression d’inachevé : séduit par l’ambiance, mais un peu frustré par le manque de mordant.


Ma note de 6.5/10 traduit bien ce sentiment partagé : c’est un film que je respecte, que j’ai même parfois iré… mais qui ne m’a pas entièrement emporté.

6
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le 23 avr. 2025

Modifiée

le 23 avr. 2025

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CriticMaster

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