"They say you're a man with true grit."

"True Grit" n'est évidemment pas un excellent western, mais il y a de quoi être surpris quand on voit la relativement mauvaise réputation qu'il traîne, ici ou ailleurs. Il ne me semble pas que la dimension mièvre soit prépondérante ici, ou du moins pas plus que dans d'autres westerns adulés par ailleurs. C'est un objet d'intérêt pour mieux évaluer le remake récent des frères Coen, mais aussi pour voir à quoi ressemblait le western à une époque charnière de son renouveau. Il est d'ailleurs assez étonnant et amusant que John Wayne (jouant John Wayne, pour une fois : vieux, faillible, et pas particulièrement dans un beau rôle) ait été récompensé d'un Oscar pour son interprétation ici, le seul de sa carrière. Un personnage qui n'a rien d'extraordinaire, si ce n'est qu'il changeait un tant soit peu des rôles classiques qu'il avait jusqu'alors endossés.


Dans sa façon de filmer les paysages américains, à une certaine époque de l'année, "True Grit" rappelle vaguement un autre western de cette époque, "Coup de Feu dans la Sierra" (à vérifier) de Peckinpah, sorti en 62. Ce côté Technicolor sans doute, et une photographie automnale tout à fait plaisante. Quelques plans magnifiques marquent les esprits et confirment que les décors naturels sont décidément un avantage majeur quand ils sont bien exploités : la cabane où les protagonistes tendent une embuscade, bordée par une rivière au creux d'un vallon, est un lieu terriblement cinégénique. L'apparition de Dennis Hopper est aussi brève qu'appréciable, tout jeune, dans le rôle d'un "méchant" attachant. La présence de Robert Duvall est aussi à mettre au compte des petits plaisirs du film, et les deux compensent tant bien que mal le personnage bien fadasse du Texas Ranger.


La scène épique (ou du moins censée l'être) dans laquelle Wayne charge 4 malfrats les rênes du cheval serrés entre les dents, un fusil dans une main, un pistolet dans l'autre, a par contre assez mal vieilli... On frise le ridicule. L'opposition thématique entre la jeune fille et le vieux bougon ne m'est pas apparue si ridicule que ça par contre, et si le jeu sur les tempéraments différents est un peu maladroit, il ne sombre jamais dans la parodie idiote, il n'est jamais purement sentimentaliste. Un côté suranné doté d'un certain charme. On serait presque tenté d'y voir un parti pris fort de la part de Hathaway, en réalisant un western aussi traditionnel et doucement naïf dans ses valeurs, décontracté dans son ton, alors que le genre avait déjà disparu depuis longtemps (dans sa forme classique) et travaillait à sa redéfinition.


[Avis brut #84]

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le 20 avr. 2016

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Morrinson

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