Je suis toujours un peu gêné quand je ressors d’une œuvre avec le sentiment d’être é à côté… sans même savoir si c’est elle ou moi le problème. C’est exactement ce que je ressens avec Transperceneige. Une BD que je voulais aimer! Pour son concept, pour son influence, pour cette ambiance de fin du monde sur rails qui m’a toujours fasciné.
Mais voilà... Je l’ai lue, relue parfois, et je suis resté figé.
Aucun frisson. Aucun écho.
Tout est là pourtant. Le décor gelé, le train comme microcosme social, la lutte des classes en huis clos, cette tension silencieuse entre le mouvement et l’immobilisme. C’est un terreau parfait pour créer du malaise, de la violence, des dilemmes. Et pourtant, ce que j’ai trouvé à l’intérieur… c’est surtout une froideur. Une narration distante, presque clinique. Des personnages qui parlent comme des concepts, des dialogues parfois plus théoriques que vivants. J’avais l’impression de lire une œuvre qui m’expliquait ce que je devais ressentir, plutôt que de me le faire ressentir.
Visuellement, il y a une identité forte, oui. Ce noir et blanc brut, sale, rigide, qui colle à l’ambiance désespérée du monde. Une force viscérale, une tension graphique bien présente. L’aspect contemplatif, presque figé, m’a tenu à distance du danger, de la chaleur humaine, de l’urgence.
C’est peut-être aussi une question de rythme. Tout paraît compressé, ou à l’inverse étiré inutilement. Les temps forts sont souvent étouffés sous une couche d’abstraction, et les révélations tombent un peu à plat. Il y a un vrai regard sur la condition humaine, la survie, la déshumanisation progressive… mais il me manque le souffle. Cette montée en tension, cette immersion, cette colère. Ce que le film de Bong Joon-ho a réussi à m’offrir avec une violence stylisée, la BD me le raconte en sourdine, avec une sorte de raideur cérébrale.
Alors oui, c’est une œuvre importante. Elle a posé des jalons. Elle a inspiré. Mais pour moi, elle reste dans la tête plus que dans le ventre. Et j’aurais aimé l’inverse, comme pour l'excellente adaptation en film.