formidable album « Les Illuminés » sur la trajectoire mêlée de trois poètes : Rimbaud Verlaine et Germain Nouveau, les deux derniers tournant autour du premier comme les papillon autour de la flamme brûlante d’une chandelle trop lumineuse et qui les brûle à chaque fois.
la narration est faite en demie page, chaque moitié suivant l’un des trois, identifié par une couleur ocre, verte ou brune.
Disons le tout net, ce genre de procédé a, en général, le don de m’enerver.
d’abord la narration hachée où on saut en permanence d’un temps d’un lieu à l’autre, d’autre part l’utilisation du code couleur pour faire comprendre ce saut au lecteur.
je trouve cela une facilité pauvre en créativité.
mais quand ce « truc » fonctionne, on est bien obligé de baisser le chapeau et d’avouer qu’ici les auteurs, Bollée et Jean Dytar, en ont tiré le meilleur, notamment en trouvant des transitions intelligentes d’un changement à l’autre, des raisonnances qui rendent la lecture fluide sans pour autant troubler la lecture.
chaque « tronçon » pose une avancée dans le récit, une action, une question
qui trouve souvent sa réponse dans la séquence suivante.
Bref, c’est bien raconté, le procédé fonctionne à plein. Pour l’histoire en elle même, elle est ionnante, mettant en scène un des couples maudits les plus célèbre de la poésie française, dans une époque fourmillante de créativité, la fin du XIXe et on croisera en personnage secondaire quelques célébrités pas toujours nommées dont le peintre Cezanne.
On essaie de comprendre la personnalité tourmentée de Rimbaud, sa trajectoire erratique de boule de flipper. On suit les affres de ses amis-amants-irateurs qui s’accrochent à un destin qu’ils veulent grandiose et dont l’intéressé ne veut pas.
Plus le récit avance plus Rimbaud se libère même si rien ne semble aller dans son sens. Les deux autres eux s’enferment dans leur fascination pour cette étoile revêche. L’Histoire nous dit que tout cela finira mal, mais les auteurs ont trouvé une autre voix pour celle là.
n’en disons pas trop.
Enfin je terminerais avec le meilleur : le dessin de Jean Dytar, dont vous pouvez voir ici quelques pages et cases. Ce dessin impressionniste, ce traitement à la peinture rappelle le Rabaté de Ibicus (chef d’œuvre).
les compositions sont brillantes et le découpage fourmillant et inventif, évitant toujours l’ennui, n’utilisant la répétition que pour quelques effets narratifs idoines. Au pire j’ai tiqué sur l’ intégration de Photo ou d’inspiration photographique trop sensible. Mais c’est bien pour trouver quelque chose à critiquer.
Le final intègre quelques couleurs supplémentaires, subtiles, qui laisse deviner le talent que le dessinateur peintre doit savoir déployer dans une couleurs plus décoratives et moins conceptualisées.
Je vais derechef chercher les œuvres autres de ce dytar !
bonne lecture à vous, si ce texte vous a fait envie.