Au fonds, l'intrigue est très simple. Une istration new-yorkaise envoie un jeune photographe avec une liste de sujets à couvrir sur le dust bowl, ce phénomène de tempêtes de sable qui frappe le centre des Etats-Unis pendant toutes les années 1930 car des terres trop légères ont été mises en culture, et s'envolent suite à plusieurs années de sécheresse successives. Les sujets à couvrir sont délibérément dramatique : cadavre d'animal mort, ferme abandonnée, mère nourrissant son petit. On pousse le héros à mettre en scène pour donner un aspect plus dramatique à ses photos. Mais au de la population, il perd de vue ces objectifs et ces questionnements moraux pour ne voir qu'une chose, la profonde détresse de gens qui n'ont plus qu'une chose à faire : tout entasser dans leur voiture et partir pour la Californie redre tout un lumpeproletariat.
Peut-être l'aurez-vous senti à mon compte-rendu mais je ne me suis pas attaché au héros, sorte de poupée sans personnalité dans laquelle chacun peut se projeter ou non. En revanche, la mise en scène et le découpage sont parfaitement réussis, avec une alternance de photographies réelles d'archives et de planches pleine page dans des tons orange ou sepia qui est du meilleur effet artistique. Cela reste académique tout de même, ne vous attendez pas à une claque visuelle qui révolutionne votre manière de penser. Mais c'est très bien fait.
La bande dessinée se termine sur une série de monographies sur le travail de la FSA (Farm Security istration), qui finance ce type d'enquête photographique, sur son influence (Steinbeck !) et les critiques qu'elle a essuyées (le fameux "crâne ambulant d'Arthur Rothstein). Il y a aussi une mise en contexte de la fameuse photo de Dorothea Lange, Migrant mother.
Jours de sable est une enquête très documentée sur le dust bowl (la scénariste est allée se documenter sur place, dans les archives américaines), et une réflexion sur la manufacture des images capables de nous toucher. Ce dernier thème est un peu boiteux de mon point de vue, la bande dessinée n'hésitant pas à avoir recours à une dramatisation que je trouve un peu courte (la boite qu'Elijah, le héros, finit par renvoyer pleine de sable plutôt que de photographies).