J'ai découvert ce manga grâce à mon libraire attitré (pour les mangas du moins) qui m'a remis le chapitre 1 en guise de prospectus à côté de mes achats.
Que ne fut pas ma surprise de me prendre au jeu pour un genre qui n'est pas vraiment ma tasse de thé : seinen/shoujo par un auteur femme (Kaoru Mori), historique plutôt lent, voire presque slice of life par moment.
Pourtant je me suis dit : celui-là, je me le garde en tête, ça fera très probablement partie de mes achats futurs. Je me suis réellement décidé après l'avoir vu primé à Angoulême.
Le scénario est original mais ne casse pas des briques pour autant. Non, c'est vraiment le fait de se laisser glisser dans l'ambiance qui fait vraiment le charme de ce manga.
Mais trêve de commérages, entrons dans le vif du sujet.
Le récit prend en place dans l'Asie centrale (style Mongolie) du XIXe. Amir, l'héroïne, est marié à Karluk, futur chef de clan. Elle a 20 ans et lui 12. Déjà un gouffre au niveau de l'âge mais ça n'est pas réellement choquant (et la question de l'accomplissement des devoirs conjugaux ne se pose pas encore). Ne serait-ce certains ages qui rappellent que les deux sont mariés, on peut grosso modo les considérer comme frère et sœur. Et à partir de là commence l'intégration d'Amir dans sa belle-famille.
On est alors au cœur des préoccupations d'un clan familial : les différences culinaires, les coutumes, les variantes vestimentaires, les contes au coin du feu...
Dis comme ça, ça présente à priori autant d'intérêt qu'un quart de finale de curling congolais.
Mais non.
Ce qui distingue Brides Stories de « Martine à la plage » ou de « Martine fait la queue pour aller voir Intouchables », c'est clairement la qualité du dessin. Tout dans ce manga pue la classe (et pas le pétage de classe « bankai tavu bogoss »). De la classe sereine. Genre de la double page à te couper le souffle avec des étendues de steppes à n'en plus finir. Kaoru Mori ne s'est pas spécialement foulée pour les persos (la mère et la fille ont à peu près la même tronche et la fâcheuse manie d'arborer des coiffes traditionnelles, pas faciles à différencier) mais à apporter un soin tout particulier à une myriade de détails : étoffes, tapisseries, bijoux, bois sculpté, habitations, scènes de nature...
Comme dirait Jean Rochefort « tout l'art du maître est là ». Ainsi un « Karluk et Amir vont chasser le lapin à l'arc et en profitent pour aller annoncer la nouvelle de leur mariage à l'oncle nomade de Karluk dont le clan fait paître des moutons non loin de là », ça devient juste une épopée poétique.
Posé, souvent contemplatif, ça part de pas grand-chose mais ça nous immerge dans leur quotidien. Des querelles de gamins, le voisin artisan, de belles scènes de chasse, les femmes qui papotent en faisant la tambouille, une fièvre agère... Une vraie bouffée d'air frais.
Et pour ceux qui auraient peur de s'ennuyer, on a même droit à de l'action avec une rupture du mariage qui se profile (mariage d'intérêt entre clans évidemment).