Adrastée : Intégrale
7.5
Adrastée : Intégrale

BD franco-belge de Mathieu Bablet (2016)

Quand les dieux s’ennuient et que la quête de sens se transforme en randonnée philosophique

Avec Adrastée, Mathieu Bablet nous offre une épopée graphique où mythologie et introspection se croisent dans un paysage à couper le souffle. Cette intégrale se présente comme un long poème visuel, où un roi immortel, lassé de son existence, traverse le monde antique à la recherche de réponses. Et autant vous prévenir : si vous espérez des batailles épiques, c’est plutôt un marathon méditatif… mais avec des dieux bien stylés.


L’histoire suit un roi qui a tout : l’immortalité, un royaume prospère, et… un ennui mortel. En quête de finitude (et d’un peu de piquant), il décide de partir à la recherche des dieux pour comprendre pourquoi ils l’ont abandonné à son éternité. S’ensuit une traversée d’un univers antique où les paysages semblent avoir été dessinés avec une patience divine, mais où l’action est aussi rare qu’un dieu sans égo.


Le roi, personnage central, est une figure stoïque et mélancolique. Son introspection constante peut parfois le rendre un peu distant, mais c’est précisément cette froideur qui reflète son état d’âme : être immortel, c’est cool, mais être coincé avec ses pensées pendant des siècles ? Pas top. Les dieux qu’il croise, chacun campant un archétype mythologique revisité, apportent un peu de couleur et d’humanité à ce récit résolument introspectif.


Visuellement, Mathieu Bablet impressionne. Ses décors sont gigantesques, presque oppressants, et chaque case est un tableau où le moindre détail compte. Les paysages antiques, les temples démesurés, et les panoramas à perte de vue rappellent l’insignifiance humaine face au divin. Cependant, cette magnificence graphique peut aussi ralentir la lecture : on se perd parfois à contempler les cases, au risque d’oublier que l’histoire avance (lentement).


Narrativement, Adrastée est plus une réflexion philosophique qu’un récit d’aventure. Les dialogues, souvent empreints de gravité, posent des questions existentielles sur la vie, la mort, et le sens de l’éternité. C’est beau, mais cela peut parfois paraître un peu lourd, surtout pour ceux qui espèrent une narration plus rythmée. Les rencontres avec les dieux, bien que fascinantes, restent souvent allusives, laissant au lecteur le soin de combler les vides.


Le principal reproche qu’on pourrait adresser à Adrastée, c’est son rythme contemplatif qui flirte parfois avec la lenteur excessive. Les réflexions existentielles du roi, bien que profondes, peuvent donner l’impression de tourner en rond, un peu comme son éternité. Mais pour les amateurs de récits qui privilégient l’ambiance et la méditation, c’est un régal.


En résumé, Adrastée est une œuvre visuellement éblouissante, où Mathieu Bablet explore les thèmes universels de l’immortalité et du sens de la vie avec une ambition rare. Si l’histoire souffre parfois de son rythme lent et de son ton un brin solennel, elle compense largement par sa beauté graphique et sa richesse thématique. Un voyage introspectif à savourer comme un verre de vin grec : riche, complexe, et parfois un peu âpre.

7
Écrit par

Créée

le 31 déc. 2024

Critique lue 15 fois

2 j'aime

CinephageAiguise

Écrit par

Critique lue 15 fois

2

D'autres avis sur Adrastée : Intégrale

Avis mitigé

Ce livre, c'est une claque visuelle. Je suis restée plusieurs minutes à contempler des planches de cette BD, ou même de simples cases. C'est beau. Très travaillé, dans le moindre détail. Mais une...

Par

le 9 oct. 2016

15 j'aime

2

Beau mais vain

Un livre d'une grande beauté, avec des dessins détaillés, des couleurs magnifiques. Dommage que l'histoire traine en longueur et ne soit pas du tout intéressante. On est juste tenu par la qualité...

le 23 sept. 2016

5 j'aime

Langueurs immortelles

Superbe graphiquement et avec un rythme subtil enchaînant contemplation, oubli, action et souvenirs. J'ai vraiment plongé dans ce récit ou l'image, le texte et le rythme induit par la lecture...

Par

le 19 oct. 2016

3 j'aime

Du même critique

Quand Astérix et Obélix découvrent Lutèce

Avec La Serpe d’or (1962), René Goscinny et Albert Uderzo emmènent Astérix et Obélix dans leur première grande aventure hors du village, direction Lutèce. L’occasion de découvrir que les Gaulois ne...

le 20 déc. 2024

6 j'aime

Quand être un agent secret signifie survivre à un scénario en roue libre

Si Agents of S.H.I.E.L.D. était une mission, ce serait un plan hyper élaboré qui tourne mal dès la première minute… mais que tout le monde continue comme si de rien n'était.Le concept est censé être...

le 20 mars 2025

4 j'aime

3