Chinese Queer
6.6
Chinese Queer

BD de Seven (2020)

Dans la tête d'un paumé cynique

lecture très étrange. Au vu du titre (et du texte de 4 de couv) je m’attendais à une enieme chronique autobio sur la difficulté de vivre sa vie en tant que LGBT spécialement en Chine (je cite « gay en chine c’est pas gagné »)

Mais en fait pas du tout.

On suit le narrateur, Tian Fushi, dans ses errances, le plus souvent nocturnes dans les rues et bar de la ville de Haimen toute proche de Shanghai.

Tian est un étudiant, en quoi ? on ne le saura pas. d’ailleurs il cherche à se désinscrire de la fac, sans essayer vraiment fort.

il raconte ses amitiés de beuveries, des amis abîmés, ses amours aberrantes et les oiseaux de nuit qu’il croise sans que personne ne se comprenne vraiment.

Graphiquement, le dessin ultra déformé rappelle certains film d’animation (Vermines ou Primal) c’est hyper dynamique. les décors sentent un peu le dessin d’ après photo, d’ailleurs certaines cases ne le cachent même pas.

la couleur est violente, saturée, pleine de dégradés improbables, une bouillie chromatique qui bizarrement fait hyper bien é les ambiances nocturnes et festives. parfois l’auteur alterne avec des ambiances quasi monochromes qui soulage la lecture, avant de replonger dans le magma citadin.

La lecture est souvent gâchée par l’intégration à la diable des typos de textes en balance avec un détour noir, très pénible à lire. Moche.

L’histoire est à l’image du protagoniste principal : elle stagne. à aucun moment un récit ne semble se dégager des 240 pages du livre. On recroise certains personnages, mais rien ne vient vraiment relier ces âmes entre elles.

Le livre est comme un vaste tableau de la ville, du quartier, survolant tel ou tel caractère pour un bref instant d’attention, avant d’enchaîner sur une nouvelle beuverie.

Les amours du héros sont à sa hauteur : deceptive et médiocre.

En revanche, ce qui sauve ce Polaroïd sous acide de la jeunesse chinoise queer (encore que ce soit peu le sujet) c’est le monologue intérieur du personnage.

En général, c’est un procédé que je déteste, monotone et convenu, souvent redondant avec l’image.

sauf que là, ces pensées intérieures prennent une saveur particulière tant la personnalité du personnage et sa façon de s’exprimer sont singulières.

Le personnage fait irrépressiblement penser à Igniatus Reilly (« la conjuration des imbeciles ») et semble sortir d’un roman de Bret Easton Ellis : cynique, indifférent, autodestructeur, il autopsie sa vie sans complaisance à la façon d’un Fabrice Neaud (la culture en moins)

chacune de ses saillies est surprenante, parfois dérangeante… racontant, par exemple, l’histoire d’un homme à 4 pénis dont un seul « fonctionne » (ejacule) jusqu’à ce qu’une ex vienne lui trancher son « bon pénis »

On est dans ce niveau de délire.

Mais le monologue n’y est pas permanent (sinon ce serai très chiant) La narration fait la part belle aux moments suspendus. Cet instant où tu réalise que tu n’as plus qu’une clope, les retours muets saoul dans un taxi, les marches solitaires dans la ville, le levé de soleil.

Alors oui, il ne se e rien, l’histoire pourrait courir sur 400 ou 500 pages de plus. Mais comme c’est formidablement écrit, il y a un grand plaisir à courir d’une phrase tranchante à un visage déformé.

Bref, un OVNi que je suis content d’avoir découvert, le parcourant par à coup, pour éviter l’overdose.

8
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le 16 avr. 2025

Critique lue 2 fois

CapitaineNemo

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