Il y a de ces albums qui donnent cette sensation singulière d’être fait pour nous, de l’avoir toujours été. C'est comme si chaque note, chaque son résonnait comme notre propre reflet mental et échappait à toute analyse formelle. Après deux ans que je connais Souvlaki, les albums qui peuvent se targuer de me donner cette si singulière sensation doivent se compter sur les doigts d’une main. Que de souvenirs de mes premières écoutes de cet album. Avec My Bloody Valentine, Slowdive et Ride, j’avais l’impression de voir dans le shoegaze une source infinie de plaisir, qui m’accompagnait aussi bien dans le bonheur que dans le malheur. Je lançais l’un des 10 titres de l’album, je levais les yeux au ciel et j’étais parti pour un voyage formidable dans ce bleu d’une douceur enivrante, au milieu des nuages, des trainées d’avions, du soleil. J’imaginais que les nuages m’entouraient de leur épaisseur cotonneuse et me réchauffaient douillettement.
Ecouter cet album, c’est savoir que pour 40 minutes, je vais vivre dans un cocon, à l’abri du monde, flotter naïvement au milieu d’un océan de lumière. Une lumière chaude, tourbillonnant et dansant avec une infinie grâce au milieu d’un monde fait d’obscurité et de froid. Souvlaki, c’est une hirondelle qui chante l'éternité à la tombée des feuilles, la lumière encore diffuse du matin qui fait fondre la neige, un souvenir qui réchauffe le cœur dans la solitude. C’est un homme du nord qui observe les dernières lueurs du soleil à l’horizon et tente d’en puiser le plus de chaleur possible pour affronter la nuit glacée à venir.
Souvlaki, c’est le doudou de ceux qui, lors d’une nuit d’hiver, affectionnent la chaleur ouatée de leur couette plus que tout au monde.