Encensé, sanctifié, brandi comme l’album féministe ultime, un uppercut artistique, un cri du cœur mis en musique… et tout ça parfaitement marketé.
Il a suffi que Beyoncé casse une voiture en slow motion et prononce "Boy, bye" pour que les critiques s’agenouillent comme si elle avait réinventé le feu.
Mais quand on gratte le vernis doré, qu’est-ce qu’on entend vraiment ?
Un grand disque ? Ou un manifeste sonorisé qui fonctionne surtout quand on le regarde ?
J’ai écouté Lemonade sans les clips, sans le buzz, sans les hashtags. Juste le son. Et voilà ce que ça donne : une dégustation acide, entre intentions nobles et exécution parfois bancale.
🍋 Track by track
1. Pray You Catch Me – 7.5/10
Jolie intro. Sobre. Intime. Mais soyons honnêtes : ça flotte gentiment dans un bain d’eau tiède où Sade aurait oublié de mettre du sel. Touchant mais fade.
2. Hold Up – 8/10
Le moment où Beyoncé devient une sirène vengeresse qui balance des vérités en robe jaune. Le sample de Yeah Yeah Yeahs est brillant, mais le morceau tient debout grâce à la mise en scène, pas grâce à sa musicalité. Tu retires le clip, t’as juste une balade en pantoufles sur un beat reggae.
3. Don’t Hurt Yourself (feat. Jack White) – 9/10
LE moment de grâce. Beyoncé en furie divine, Jack White au taquet, ça crache, ça saigne, ça hurle. Et surtout, ça sonne. Enfin une chanson qui tient sans le PowerPoint émotionnel.
4. Sorry – 7.5/10
Catchphrase culte ("Boy, bye"), beat efficace, attitude tranchante. Mais t’as entendu ça mille fois ailleurs, en mieux, chez des artistes moins "brandés". La rage paraît calibrée pour les stories Insta.
5. 6 Inch (feat. The Weeknd) – 6.5/10
Ambiance moite mais générique. The Weeknd en mode somnambule sous sédatif. Tu ressens l’effort de faire du cool, mais ça sent le board marketing.
6. Daddy Lessons – 5/10
Une tentative country façon "Nashville pour les nulles". Ça fait bien sur papier, mais dans les oreilles, c’est juste bizarre. La voix n’y est pas, l’authenticité non plus.
7. Love Drought – 7.5/10
Très joli sur le moment, immédiatement oublié ensuite. Production atmosphérique, mais émotion sous-exploitée. Une berceuse qui pense être une cathédrale.
8. Sandcastles – 6.8/10
Piano voix, fragilité mise en avant. C’est sincère, mais vocalement à côté de la plaque sur certains ages. Et ça ne décolle jamais vraiment.
9. Forward (feat. James Blake) – 4.5/10
Une idée ? Oui. Une chanson ? Non. Deux minutes de murmures et d’eau tiède pseudo-arty. Même James Blake semble ne pas savoir pourquoi il est là.
10. Freedom (feat. Kendrick Lamar) – 8.8/10
Beyoncé en mode MLK meets Nina Simone. Puissant, percutant, et Kendrick relève le niveau comme d’hab. C’est un grand moment… mais un peu plaqué dans l’album.
11. All Night – 8/10
Une vraie chanson. Mélodique, bien produite, sensible. Enfin un retour à une forme classique mais efficace. La lumière au bout du tunnel.
12. Formation – 9.5/10
OK. Là, elle a tout tué. Production d’un autre monde, message, flow, présence. Le sommet de l’album, et celui qui méritait tout le battage médiatique.
📉 Note finale : 6.5/10
Lemonade, c’est l’album où tout le monde s’est mis à genoux non pas pour les sons, mais pour ce que ça représentait. Et oui, le message est fort. L’iconographie est brillante. Mais musicalement ? Inégal, souvent creux, parfois bancal. Ça frôle l’excellence une chanson sur quatre, mais le reste est une succession de styles empruntés, pas incarnés.
En résumé : Beyoncé a sorti une œuvre multimédia. Mais un chef-d’œuvre musical ? Non. Trop d’habillage, pas assez d’essence.